RÉTROSPECTIVE : Purple Haze ou l’homme qui marchait sous la mer

jimi hendrix psychedelicPar Rémi Léonard

Le 17 mars 1967 était lancé le single Purple Haze par un jeune guitariste afro-américain jusqu’alors inconnu dans son pays natal. Ce James Marshall Hendrix allait bientôt devenir une véritable icône du rock et de la contre-culture des années 1960 aux États-Unis. L’auteur-compositeur-interprète Jimi Hendrix reste, encore aujourd’hui, une légende de la musique, sacré meilleur guitariste de tous les temps par le magazine Rolling Stone en 2010. Beaucoup l’ont d’ailleurs découvert grâce à la chanson Purple Haze, qui reste l’une de ses plus connues à ce jour.

Qu’a-t-elle donc de si spéciale? Dès l’introduction, on comprend qu’on a affaire à un guitariste non orthodoxe maniant de manière avant-gardiste la distorsion de la guitare électrique en la domptant grâce à des pédales d’effets. Qui plus est, la combinaison de notes que son bassiste et lui enchaînent est connue depuis longtemps en musique comme l’«intervalle du diable», ou diabolus in musica en latin, banni par l’Église catholique depuis le XIIIe siècle. Peu importe, le résultat donne un son électrisant, à la fois brut et raffiné.

La brume pourpre

Outre la remarquable maîtrise de son instrument, les paroles d’Hendrix contribuent également au style psychédélique qu’il met de l’avant. Perte de repères spatiaux (Don’t know if I’m comin’ up or down) et temporels (Don’t know if it’s day or night), la réalité est remise en question à travers l’influence de cette mystérieuse brume pourpre (Purple haze, all in my brain / Lately things, they don’t feel the same).

De nombreux fans d’Hendrix soutiennent que la chanson fait directement référence à l’usage de psychotropes. D’ailleurs, une variété de cannabis reconnue pour la couleur violette de ses feuilles porte aussi le nom «Purle Haze». Le principal intéressé a toutefois toujours soutenu une version complètement différente. L’inspiration lui serait venue en rêve après qu’il ait lu un roman de science-fiction publié en 1966, Night of Light, de Philip José Farmer. L’histoire prend place sur une planète où le ciel devient violet au crépuscule et désoriente ses habitants. Hendrix rêve ensuite qu’il foule le sable de cet endroit fantastique, mais sous la mer! Inspiré par cette image, il compose Purple Haze dans un club de Londres juste avant une prestation.

Si la version studio est un condensé de rock explosif et innovateur, elle se limite à 3 minutes pour les besoins de la radio. C’est plutôt en spectacle que l’on peut apprécier les légendaires solos du prodigieux guitariste gaucher. Véritables enchaînements de notes aussi imprévues que recherchées, ces performances où l’improvisation atteint des niveaux records peuvent s’étirer sur plusieurs minutes en partant dans les directions improbables où Hendrix veut bien nous emmener, sans jamais décevoir. Lorsqu’en plus il défie les lois du bon sens en jouant les mains derrière son dos et avec ses dents, ou simplement par son habillement, Hendrix construit aussi sa légende en tant que bête de scène, qui culmine lorsqu’il immole sa Stratocaster sur scène en guise de sacrifice.

’Scuse me while I kiss the sky

Lors de sa sortie il y a 48 ans jour pour jour, Purple Haze connaît un succès fulgurant en Angleterre où il atteint le 3e rang du palmarès officiel des singles, mais c’est aussi sa présence sur le célèbre album Are You Experienced? qui fera d’elle une chanson iconique du rock psychédélique à travers le monde. Sa carrière lancée, le jeune Jimi Hendrix parcourra les scènes de Londres, Stockholm, San Francisco, Paris, New York et Berlin entre autres. Il fait aussi un unique passage à Montréal à l’aréna Paul Sauvé le 2 avril 1968, mais aucun concert ne restera aussi marquant que sa performance au mythique festival de Woodstock en 1969, où il joue bien évidemment Purple Haze.

À travers l’héritage musical colossal de Jimi Hendrix, la chanson Purple Haze reste sans aucun doute parmi les plus remarquables du XXe siècle.


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