
Par Olivier Dénommée
À la 4e journée de cette 30e édition du Festival international du blues de Tremblant, le beau temps était très présent – voire trop présent! – avec une chaleur et un soleil accablants. Mais cela n’a visiblement pas empêché le public de répondre présent en grand nombre et de montrer la foule la plus impressionnante de tout ce festival. Voici notre petit compte rendu de ce qu’on y a vu samedi.
12h15 : Rob Lutes
Si on exclut les soundchecks des artistes se préparant déjà à monter sur les scènes officielles, la première performance qu’on a eu la chance d’écouter est celle du bluesman montréalais Rob Lutes. On a gardé d’agréables souvenirs de son album Walk in the Dark en 2017 et on a voulu voir de quoi il était capable en live. Le contexte était similaire à celui où on a pu voir Adam Karch ces derniers jours : une performance dans le village, à un endroit qu’il fallait trouver. Avec la chaleur, Lutes a eu la bonne idée de jouer à un endroit à l’ombre et il n’est pas venu seul, lui qui jouait accompagné par le bassiste Alec McElcheran. Les 2 ont livré un blues-folk assez efficace, avec le sourire et une pointe d’humour, particulièrement entre les chansons. On n’a pas toujours besoin de pousser les choses à l’extrême pour être efficace et Rob Lutes nous l’a vite rappelé durant sa brève performance. Espérons qu’il aura converti plusieurs membres du public à aller voir son «vrai» show, tenu aujourd’hui en début d’après-midi.

15h15 : Jim Zeller
Rob Lutes nous aura réchauffé en vue du spectacle de Jim Zeller, ce monument du blues québécois qui semble être là depuis toujours, ce qui est d’autant plus vrai avec l’histoire du festival : en 30 édition, Jim Zeller aurait participé à 28 d’entre elles! À 72 ans, Zeller n’est plus une jeunesse, mais il n’a rien perdu se sa fougue et il est venu accompagné d’amis de longue date et même de sa blonde pour un spectacle dont il a le secret, à 5 musiciens.
Le gros blues était bien sûr à l’honneur, autant lorsqu’il chantait que dans les morceaux instrumentaux où il faisait résonner son harmonica, et, désirant se réinventer (ce qui n’est pas une mince affaire quand on vient aussi souvent au même festival), il a fait savoir que cette fois, il voulait laisser davantage de place aux improvisations avec ses complices. Dans tous les cas, on n’y a vu que du feu et le spectacle a semblé très bien huilé. Mention également à la flamboyante Bella Godmer, qui partage la vie de Jim Zeller depuis quelques années déjà : choriste sur la plupart des chansons, elle a eu l’occasion à quelques reprises de vraiment montrer de quoi elle est capable vocalement.

On aurait voulu assister à l’entièreté du spectacle, mais la température était trop élevée pour rester devant la scène, une véritable îlot de chaleur asphalté. Notre quête de fraîcheur nous a néanmoins permis d’écouter d’autres artistes qui n’étaient pas à notre liste, ce qui n’est pas complètement mauvais!
16 h : Prado Brothers
Sur la scène principale se trouvaient les Prado Brothers, un groupe blues d’origine brésilienne. On ne connaissait pas du tout ces musiciens, mais on a l’impression qu’ils se sentaient un peu à la maison à jouer durant un telle météo! On a passé l’essentiel du spectacle dans un restaurant (à l’air climatisé) à côté de la scène où ils jouaient, mais on a pu écouter avec attention leur blues énergique et rythmé qui trahissait leur côté latin. On doute que le spectacle aurait frappé aussi fort s’il faisait plus froid dehors!
On n’a pas nécessairement reconnu la plupart des chansons jouées à cette occasion, mais la finale était iconique : la fameuse Get Up (I Feel Like Being a) Sex Machine de James Brown. On n’a pas vu comment le public réagissait à cette ultime chanson, mais ça nous a certainement arraché un sourire de notre table.

19h30 : Guy Bélanger
Il était impensable pour nous de manquer le passage de l’harmoniciste Guy Bélanger au festival. Artiste soulignant plus de 50 ans de carrière, il ne semble pourtant pas vieillir et avait beaucoup de matériel à offrir à son public venu nombreux pour l’occasion. Seulement 4 musiciens étaient sur scène, mais ça sonnait, comme il se doit, comme une tonne de briques. On a d’ailleurs reconnu parmi eux Alec McElcheran, le bassiste qu’on a vu plus tôt accompagner Rob Lutes, rappelant une fois de plus à quel point le monde blues est petit. Et justement, Lutes a été invité le temps d’une chanson très réussie. Guy Bélanger a aussi fait appel, en fin de spectacle, au saxophoniste Kaven Jalbert, notamment membre du Ben Racine Band (on y reviendra). Dire que c’était tout un spectacle auquel Guy Bélanger et sa troupe nous conviait serait un euphémisme.
Mais ce qu’on retient de la performance est le fait qu’un tout nouvel album s’apprête à sortir dans les prochaines semaines, le 22 août pour être exact : enregistré à Londres, plus précisément à Abbey Road. Si l’album est à la hauteur de la performance offerte samedi, ça promet!

21h : Show 30e anniversaire
S’il n’y avait qu’un spectacle à aller voir durant les 5 jours de blues, c’était assurément celui-ci. Le spectacle soulignant les 30 ans du Festival recevait pour l’occasion certains des artistes chouchous de l’événement, accompagnés par le house band, le Ben Racine Band composé de 7 musiciens. Déjà en lui-même, le Ben Racine Band avait tout pour livrer une performance électrisante, mais il invitait tour à tour un des artistes du festival pour une chanson où il avait une chance supplémentaire de briller.
Tout était en place pour une fin de soirée mémorable. Le ciel est devenu plus nuageux à l’approche du spectacle, mais cela ne s’est jamais traduit en pluie. Et même l’animateur du festival, qui est fidèle au poste depuis 29 des 30 dernières années, s’est montré étonné de voir autant de gens dans la foule. On peut confirmer qu’il était encore plus ardu qu’à l’habitude de circuler pour prendre des photos!
En vrac, mentionnons quelques-uns des moments qui nous ont marqués de ce spectacle : Jimmy Bowskill, découvert au Festival quand il n’avait que 12 ans (il en a aujourd’hui 34… il a littéralement grandi avec cet événement!) semble être parfaitement à la maison quand il monte sur scène à Tremblant et commentaire similaire pour Justin Saladino, qui a fait ses premières armes au Festival à 11 ans et qui en a aujourd’hui 30; Angel Forrest laisse toujours une forte impression lorsqu’elle monte sur scène et c’était aussi le cas hier lorsqu’elle a joué avec son mari Denis Coulombe, si bien qu’on a entendu à plus d’une reprise les gens réagir en la voyant arriver «Ah oui, c’est celle qui a joué hier (vendredi)!».
La révélation de la soirée pour nous est possiblement Angelique Francis, venue accompagnée de 2 de ses sœurs aussi musiciennes, livrant un blues incroyablement entraînant sur lequel les musiciennes donnaient l’exemple en bougeant elles-mêmes constamment. On n’a pas souvenir d’avoir vu une contrebassiste être aussi agile en maniant son instrument qu’Angelique Francis! C’était vraiment un grand (et trop court) moment. On n’a pas eu la chance de rester jusqu’à la toute fin du spectacle, devant quitter les lieux pendant le passage de Steve Strongman, mais aucun doute que le tout s’est terminé avec force.

C’est ainsi que s’est terminée notre couverture du 30e Festival international du blues de Tremblant. C’était une première pour nous et on y a entendu beaucoup de belles choses, même si nos pieds en ont beaucoup souffert! Le festival s’est officiellement achevé un peu plus tôt aujourd’hui et on espère que sa conclusion aura été à la hauteur du reste de l’événement. Il serait surprenant qu’on fasse une habitude de couvrir ce festival, mais il ne faut jamais dire jamais…
Pour relire le compte rendu du jour 3 du festival, c’est ici.
Notez que demain, un petit album photo de nos images préférées du festival sera aussi publié. Par la suite, attendez-vous encore à quelques critiques d’albums de blues, parce qu’après avoir été plongé dans ce genre pendant ces derniers jours, c’est difficile de ne pas vouloir prolonger le plaisir un peu!
(Toutes les photos : Olivier Dénommée)
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