
Sorti le 15 novembre 2024
Depuis le suicide de son chanteur principal Chester Bennington en 2017, Linkin Park n’avait pas encore lancé de nouvel album, jusqu’à ce qu’il annonce l’arrivée d’Emily Armstrong (des Dead Sara) à ce rôle plus tôt en 2024. Son 8e album, From Zero, allait donc être plus scruté que jamais dans ce contexte très particulier.
On n’a pas la prétention de connaître le catalogue complet de Linkin Park, mais on a comme plusieurs personnes de la génération Y grandi avec les premiers hits du groupe, particulièrement ceux de ses 2 premiers albums, Hybrid Theory et Meteora. On n’a ainsi qu’une connaissance très limitée du Linkin Park «récent», soit celui des années 2010, mais comme le groupe a reçu un accueil plus mitigé au fil des années, on est à l’aise de se lancer dans l’écoute de From Zero avec notre souvenir du Linkin Park des débuts, tout en se rappelant qu’il n’a jamais cessé d’essayer de se réinventer avec le temps.
On est rarement fan d’une introduction qui apporte si peu, mais From Zero (Intro) fait le travail en quelques secondes : nous présenter la voix d’Emily Armstrong et le titre de l’album. Ce n’est même pas trop intrusif quand on écoute l’album en boucle, ce qui est presque un exploit. C’est toutefois avec The Emptyness Machine, le premier single de l’opus, que notre écoute débute véritablement, et il faut admettre qu’on pouvait difficilement imaginer une meilleure façon de faire son retour. Musicalement, on reconnaît les ambiances typiques du vieux Linkin Park, mais avec seulement Mike Shinoda à la voix. Cela prend une minute pour qu’Armstrong fasse son entrée en scène, comme pour nous rappeler que c’est elle qui s’ajoute au groupe et non lui qui se modèle autour d’elle. La chanson est somme toute bien écrite et la dynamique avec les 2 voix est aussi très bonne, ce qui explique son succès instantané à sa sortie (la nostalgie de réécouter du Linkin Park a aussi probablement aidé).
Les chansons suivantes semblent reprendre une formule un peu similaire : Cut the Bridge laisse à nouveau beaucoup de place à Mike Shinoda et à son rap, mais avec un refrain très «rentre dedans» livré par la chanteuse. Heavy Is the Crown crinque quant à lui l’intensité à 11, avec d’un côté un rap-rock solide et de l’autre un nu metal très agressif… voire presque trop dans la dernière minute! Ça a le mérite de nous montrer le niveau d’intensité d’Emily Armstrong, mais ce n’est pas exactement l’énergie qu’on préfère entendre, personnellement.
Over Each Other se lance dans un registre plus «doux», mais pas sans un rock alternatif percussif pour appuyer les mélodies de la chanteuse. Seul commentaire : le bref segment parlé en toute fin de toune était tout sauf nécessaire, mais on ne peut visiblement pas s’en sauver! Et, comme l’intro, ce n’est pas trop dérangeant, mais juste assez pour trouver qu’il y a trop de moments comme ceux-ci. C’est surtout juste après que ça se gâte avec Casualty. L’agressivité explose carrément ici et on perd à peu près tout sens de la nuance, surtout vocalement. Pire, les couplets nous font étrangement penser à celui de Come Out and Play de The Offspring. Pas exactement la chanson la plus obscure qui existe! Elle est suivie d’une Overflow qui va dans une toute autre direction, malheureusement pas particulièrement accrocheuse.
S’ensuit Two Faced, un pur retour au classique Linkin Park, qui aurait aisément pu être lancé à l’époque des 2 premiers albums du groupe. On doit quand même noter une fois de plus les dernières secondes, qu’on devine être un échange léger entre Armstrong et Shinoda. C’est à se demander pourquoi le groupe a tenu à inclure autant de petits segments comme celui-ci dans cet album, qui n’aurait rien perdu sans leur existence. Stained est intéressante dans la mesure où elle contient autant des parties très lourdes et chargées, dirigées par la voix masculine, que des passages très enlevants, surtout livrés par Emily Armstrong. IGYEIH (pour I give you everything I have, répété abondamment dans les refrains), revient une dernière fois avec une chanson très énergique, quoiqu’un peu inégale dans son dosage avec des bouts très inspirés et d’autres un peu moins. Cela nous mène à la dernière chanson de l’album, Good Things Go. C’est aussi une des chansons les plus modérées de la sorties et aisément parmi nos préférées où le sens de la mélodie de la chanteuse et celui du rythme du rappeur sont bien mises en évidence. On aurait pris davantage de chansons de cette trempe, même si on comprend que Linkin Park ne souhaitait pas pas basculer dans un registre trop doux.
Quand on écoutait l’album avant de commencer cette critique, on s’est posé à plusieurs reprises : est-ce que telle ou telle chanson sonne comme du Linkin Park et aurait-il plus simple de simplement changer de nom? Dans plusieurs cas, on reconnaît l’essence de Linkin Park, surtout que le noyau du groupe est demeuré intact même après 7 ans, et dans d’autres cas on a senti que le groupe se cherchait dans sa nouvelle identité. Il y a du très bon et du assez ordinaire dans From Zero, ce qui n’est pas étranger au fait que le groupe cherche constamment à se réinventer et encore plus avec une nouvelle chanteuse. On ne peut s’empêcher de s’ennuyer de Chester Bennington qui savait marier à la perfection une intensité vocale inimitable et un puissant sens de la mélodie dans ses meilleures chansons, mais il serait malhonnête de dire qu’Emily Armstrong ne s’est pas bien défendue. Si elle reste à long terme avec le groupe, elle pourra certainement préciser la direction vocale qu’elle compte prendre, elle qui a semblé tester différentes approches au fil de From Zero.
À écouter : Cut the Bridge, Over Each Other, Good Things Go
7,8/10
Par Olivier Dénommée
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