The Art of Drowning – AFI

Sorti le 19 septembre 2000

La série de critiques de la discographie du groupe américain AFI a été entamée il y a un certain temps déjà, mais on arrive à peine en 2000 pour écouter son 5e album, qui baignait encore à l’époque dans les registres punk hardcore, horror punk et hardcore mélodique. On se permet donc ce «petit» saut de 25 ans pour apprivoiser The Art of Drowning.

Chaque fois qu’on retourne dans le vieux AFI, on reste surpris de constater à quel point le groupe a pu changer de style au cours de son existence. Dans The Art of Drowning, on garde le côté punk très brut, mais avec quand même un côté mélodique qui permet d’entrevoir son évolution future. L’album contient aussi une chanson qui a connu un succès intéressant : The Days of the Phoenix, qui sans être révolutionnaire, sonne bel et bien comme du punk du tout début des années 2000, avec en prime un petit passage plus inspiré.

C’est toutefois sur l’intro Initiation que l’album démarre. Du haut de ses 39 secondes instrumentales, ça ne fait que mettre la table à The Lost Souls, morceau assez typique du AFI de l’époque – rapide et énergique à souhait –, mais avec un tout un segment plus lent qui permet de mieux apprécier les variations. Ça n’en prend pas toujours beaucoup plus pour que la magie opère! Et on réalise vite que cette formule est plus ou moins répétée, à divers degrés, au fil de l’opus : c’est le cas dans The Nephilim, Sacrifice Theory (par ailleurs parmi les plus solides de l’album), Of Greetings and Goodbyes, A Story at Three (la portion douce à elle seule vaut le détour), Catch a Hot One (c’est au contraire la portion rapide qui reste le plus facilement en tête) ou encore Wester (on apprécie les refrains contagieux), ce qui veut dire que la grande majorité de l’album est plus ou moins dans ce même moule.

Ever and a Day fait plutôt le chemin inverse avec une musique relativement douce (bien que la voix de Davey Havok reste un peu criarde), avec des montées en intensité. Quant à 6 to 8, on s’approche d’une power ballade plutôt réussie. Mentionnons The Despair Factor qui sort du lot : elle débute avec une batterie électronique (avant de revenir à l’instrument habituel) et contient quelques variations déstabilisantes dans les mesures. Il y a aussi des petits segments parlés et un long bout très lent et lourd. Ce n’est pas nécessairement une chanson incontournable de l’album, mais il est intéressant de voir comment AFI a tenté de surprendre son public en 2000.

L’album se «termine» sur Morningstar, chanson douce et émotive pour vrai. Cela n’empêche pas la batterie d’arriver vers les 2min30, mais simplement pour ajouter à l’intensité vocale. La chanson s’achève par ailleurs vers 3min13… mais la piste se poursuit pendant de longues minutes encore – on avait réussi à oublier l’infame mode des tounes cachées! À 10min24 on peut enfin entendre la vraie fin de The Art of Drowning, Battled (selon Wikipedia). Est-ce voulu de finalement conclure sur du gros punk? C’est à peu près la seule explication qu’on voit parce que la chanson, très brève en passant, ne vaut certainement pas l’attente. On aurait franchement préféré juste s’assumer et conclure sur Morningstar, mais on est 25 ans trop tard pour changer les choses, malheureusement!

À chaque nouvelle sortie, on sent que AFI s’approche du point de bascule où il s’apprête à changer de style. On connaît évidemment la suite, alors on a une bonne idée de ce qui s’en vient chronologiquement, mais cela reste un exercice intéressant de voir comment s’est fait le processus créatif menant aux changements. The Art of Drowning est encore résolument punk, mais à peu près chaque chanson montre que le groupe veut ouvrir ses horizons, et il le fait de façon généralement efficace. Si davantage de chansons auraient à notre avis mérité de traverser le temps, au moins The Days of the Phoenix a dans une certaine mesure réussi.

À écouter : Sacrifice Theory, A Story at Three, The Days of the Phoenix

7,7/10

Par Olivier Dénommée


En savoir plus sur Critique de salon

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.