Good Morning Susie Soho – Esbjörn Svensson Trio (E.S.T.)

esbjorn-svensson-trio-good-morning-susie-sohoSorti en 2000

Le groupe de jazz instrumental Esbjörn Svensson Trio (ou E.S.T.) a sorti en 2000 un cinquième album studio (sixième si on compte l’album enregistré en live précédemment), appelé sympathiquement Good Morning Susie Soho. L’album précédent, From Gagarin’s Point of View, avait été le tremplin du groupe vers une reconnaissance internationale grâce à un jazz aux mélodies plus accessibles et accrocheuses; cet effort se poursuit avec cet opus avec quelques titres qui demeureront dans l’histoire du trio suédois.

Somewhere Else Before démarre l’album de plus d’une soixantaine de minutes tout en douceur. Le piano d’Esbjörn Svensson est délicat mais solide à la fois, offrant une musicalité épurée à laquelle il est difficile de résister. Comme toute bonne pièce de jazz, un build-up discret mais efficace à travers de longues minutes vont augmenter l’intensité de la pièce, sans sacrifier cette musicalité.

Évidemment, le trio ne fait pas que dans ce registre dorénavant. Plusieurs compositions reprennent une esthétique plus bop, où la mélodie est sacrifiée pour la technique. C’est le cas de pièces comme Do the Jangle, dont on ne se souviendra guère dans la grande histoire du groupe.

Serenity qui suit pourrait être considérée comme une interlude, elle qui ne dure même pas deux minutes et ne met en scène que le pianiste. Mais cette brève composition est d’une grande beauté. Dommage qu’elle ne dure pas plus longtemps! Elle mène à The Wraith, au contraire une des pièces plus longues de l’album. Sur un fond de sons électroniques qu’on entend continuellement en arrière-plan, l’ambiance se veut un peu plus mystérieuse, voire tendue. L’énergie évolue à travers la composition de plus de neuf minutes, mais ce son continue à «hanter» l’arrière-plan du début à la fin. Choix esthétique bien particulier. À moins que le wraith en question soit ce son? Mystère…

La pièce-titre de l’album, Good Morning Susie Soho, ne restera pas dans l’imaginaire non plus, malgré les effets ajoutés à la basse qui lui donnent une énergie plus «synthé». Les idées musicales restent intéressantes, mais E.S.T. arrive à faire mieux sur d’autres pistes de l’album, comme Pavane (Thoughts of a Septuagenarian). Le titre le laisse présager et la musique le confirme : on a droit ici à une pièce lente, empreinte de nostalgie. Cette douceur est brisée assez drastiquement avec Spam-Boo-Limbo qui suit : la vigueur est à l’honneur, avec une mélodie forte et une participation accrue des autres membres du trio. Ajoutons à cela un peu de synthés et des solos impeccables autant d’Esbjörn Svensson que de son contrebassiste Dan Berglund. Seul bémol à la pièce autrement impeccable : la fin laisse perplexe.

Les dernières compositions de l’album se veulent douces et émotives. C’est autant le cas pour The Face of Love que pour Reminiscence of a Soul, qui clôture l’opus… ou presque. Après cette œuvre et un silence de quelques minutes, une pièce cachée se dévoile. Lente encore, mais d’une lourdeur extrême, la compo pourrait presque être entendue sur un album métal; il suffirait de changer le piano pour une guitare électrique et on y est.

Bref, comme à son habitude, E.S.T. explore plusieurs registres dans un même album, mais il semble avoir eu un faible pour les ballades plus sentimentales en composant les œuvres de Good Morning Susie Soho. Cela en fait un bon album à écouter en arrière-plan, pour créer de l’ambiance. Quelques titres sont mémorables, mais l’ensemble de l’album est plutôt bon. La tangente que le groupe jazz a prise depuis son album précédent se confirme et se peaufine petit à petit. C’est beau à entendre!

À écouter : Somewhere Else Before, Pavane (Thoughts of a Septuagenarian), Spam-Boo-Limbo

8/10

Par Olivier Dénommée


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