CHRONIQUE : Le retour d’Oscar Peterson?

remi_bolduc_jazz_ensemble_swingin_avec_oscar_grandePar Olivier Dénommée

Le 23 décembre 2007, le grand pianiste canadien Oscar Peterson rendait l’âme à l’âge de 83 ans. Pourtant, de vendredi 3 février, on aurait juré l’entendre de nouveau, à travers les doigts de Taurey Butler, au début de la tournée Swingin’ avec Oscar, où il joue avec le Rémi Bolduc Jazz Ensemble. La première de cette tournée, quelques jours à peine après avoir fini une autre tournée en hommage à Dave Brubeck, a eu lieu le vendredi 3 février à Saint-Hyacinthe, ville natale du leader et saxophoniste Rémi Bolduc.

C’était courageux pour le quatuor de tester son matériel dans une ville n’ayant pas un rapport particulier avec le jazz. Heureusement, l’accueil a été suffisamment chaleureux pour le groupe, même si l’Espace Rona du Centre des arts Juliette-Lassonde aurait pu accueillir plus de gens. Faut dire que dans la salle principale, on avait affaire à l’humoriste Philippe Bond, et que les humoristes ont la cote dans la ville montérégienne. Cela n’a pas empêché à Rémi Bolduc et ses musiciens d’offrir une belle performance bien sentie où tous les musiciens avaient leur instant de gloire : merci aux solos bien répartis, qui laissaient évidemment la place principale à Rémi Bolduc et à Taurey Butler, mais parfois aussi au contrebassiste Fraser Hollins et au batteur Dave Laing.

Quant au choix des pièces, Bolduc a fait ses devoirs et a bien fait le tour du répertoire d’Oscar Peterson. Moins connu comme compositeur que comme interprète, il n’avait que peu de pièces qui étaient incontournables pour le spectacle, si ce n’est Place St. Henri, associée au quartier où le pianiste est né et a grandi. Aussi de la Canadiana Suite, on a aussi entendu une très belle version de Laurentide Waltz, où Butler a offert un très beau moment au piano. Sinon, le répertoire était assez varié, touchant à pratiquement tous les registres abordés par le grand Oscar. Petit coup de cœur pour la très jolie Samba Sensitive. On a aussi eu droit à deux standards que Peterson avait joués : des airs parfois plus connus que ses compositions, ce qui a probablement plu à quelques personnes dans l’auditoire.

Côté interprétation, l’ensemble était cohérent et personne ne volait vraiment la vedette dans le groupe. Je n’aurais pas détesté entendre le piano plus au premier plan, mais c’était en quelque sorte à l’image d’Oscar Peterson qui laissait lui-même souvent la place à d’autres musiciens. Rémi Bolduc a su prendre sa place dans les arrangements, mais sans l’enlever automatiquement au piano. C’était finalement un bon compromis qu’il a offert. Les solos étaient nombreux, mais jamais étouffants. Les membres de l’ensemble de Rémi Bolduc se connaissent depuis longtemps et ça s’entend : la chimie était évidente, et même le pianiste semblait être assez à l’aise.

Bref, le quatuor a largement livré la marchandise, pas de doute ici. Dommage que le public n’a pas toujours su l’applaudir comme il se doit : on sentait souvent des hésitations à applaudir à la fin des solos, pourtant très solides. Même à la fin, on avait peur que le groupe ne revienne pas sur scène pour un rappel, même si la dernière pièce était écrite sur le programme. Rémi Bolduc a semblé juger les applaudissements suffisants pour revenir jouer le standard The Touch of your Lips, une finale toute douce, jouée en format acoustique.

La tournée Swingin’ avec Oscar est donc officiellement lancée, et fera le tour de plusieurs salles au Québec au cours des prochains mois pour faire (re)découvrir la musique d’Oscar Peterson à qui voudra l’entendre. Un album doit aussi paraître très bientôt – des problèmes ont fait en sorte qu’ils n’ont pas pu être prêts pour le début de la tournée, ce qui n’est évidemment pas optimal – ce qui sera aussi intéressant à entendre. À suivre, entre les nombreux autres projets du prolifique saxophoniste.


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