Unreal Unearth – Hozier

Sorti le 18 août 2023

C’est un peu gênant à admettre, mais notre connaissance du musicien irlandais Hozier (Andrew Hozier-Byrne de son vrai nom) se limitait jusqu’à récemment essentiellement à sa fameuse chanson Take Me to Church. 10 ans plus tard, on se décide enfin à écouter plus sérieusement sa musique, à travers son troisième album, Unreal Unearth.

Selon ce qu’on peut en lire, cet album a été écrit en contexte pandémique et il s’inspire de l’Enfer de Dante pour certains thèmes abordés. Ceci étant dit, l’album est très éclectique, diversifié et, disons-le, un peu long avec une durée de 62 minutes en 16 pistes!

La première chanson, De Selby (Part 1) offre un début acoustique et feutré, qui finit par surprendre quand Hozier se met à chanter en gaélique, chose qui semble excessivement rare en musique populaire. La fin de la chanson prend même un ton plus intense et mystérieux, toujours sans qu’on comprenne de quoi il en retourne. Toute une entrée en matière! Toutefois, De Selby (Part 2) va complètement ailleurs et on peine à associer les deux chansons tellement rien ne semble les lier à part le titre. De Selby (Part 2) est d’ailleurs un des extraits de l’album et avec raison parce qu’elle offre des lignes rock plutôt accrocheuses.

First Time laisse place à une certaine douceur au début, avant de devenir de plus en plus pop au fil de la chanson. On avoue avoir des sentiments partagés sur cette direction musicale, même si on reconnaît l’efficacité de la composition! On apprécie davantage le build-up de la suivante, le single Francesca, alternant avec beaucoup de succès les couplets émotifs et les refrains très chargés. L’ajout des «ah-ah» est peut-être un peu facile comme procédé, mais l’effet demeure réussi, alors c’est un peu plus facile de le pardonner. Une troisième énergie fait son apparition vers la fin de la chanson, une portion très aérienne mais quelque peu confuse. Peut-être qu’Hozier cherchait une façon originale de conclure cette chanson?

I, Carrion (Icarian) surprend par un morceau qui reste doux du début à la fin, mettant bien de l’avant les paroles du chanteur. Si elle ne nous interpelle pas plus que ça au début, on finit par s’attacher à la chanson au fil des couplets, aidé par quelques lignes de cordes insérées ici et là. C’est beaucoup moins dans la nuance avec Eat Your Young, extrait qui saute à pieds joints dans le registre pop. Ce n’est pas mauvais et c’est même accrocheur, mais ce n’est pas quelque chose qu’on écouterait en boucle, disons!

On a toutefois une belle surprise avec Damage Gets Done, en duo avec Brandi Carlile, qui donne une autre couche à la chanson, même si la toune a un enrobage qui n’est pas sans rappeler certaines chansons de Noël (écoutez-la, vous comprendrez peut-être de quoi on parle!)… Mais dans un registre plus émotif, Who We Are vise dans le mille. Son of Nyx explore aussi avec un certain succès dans le registre plus aérien, même si la piste ne devient jamais tout à fait mémorable.

Un autre extrait, All Things End, suit. Celle-ci a quelque chose de particulier avec son enrobage presque soul, drôlement efficace, quoiqu’on en dise! To Someone from a Warm Climate (Uiscefhuaraithe) ramène la langue irlandaise, accompagné d’un discret piano. La chanson prend tout son sens avec la suivante, Butchered Tongue, en référence à cette langue que les Anglais ont voulu effacer, une réalité avec laquelle nous avons déjà été familiers au Québec… En plus de traiter d’un sujet sensible, la chanson est tout simplement magnifique au niveau des mélodies et des arrangements, encore une fois plutôt feutrés. Disons que quand on passe à l’ensoleillée Anything But, notre mood n’est pas au rendez-vous! Ce qui est dommage, parce que ce n’est pas une composition inintéressante. Même Abstract (Psychopomp) revient à la ballade, renforçant l’impression qu’Anything But est un intrus dans cette partie de l’album.

Unknown / Nth est probablement le choix de single le plus surprenant qu’Hozier ait fait sur cet album : la chanson est dépouillée et il ne s’y passe pas grand-chose pour la majorité de la chanson, même si on sent le désir d’exploser à tout moment. On arrive à gagner en intensité peu avant la marque des 3 minutes, mais pas assez pour justifier de pousser la chanson à la radio, à notre avis, surtout qu’on perd rapidement cette énergie pour finir comme on a commencé. Drôle de décision! On apprécie davantage la suivante, la très rock First Light, redonnant du pep après plusieurs chansons moins puissantes et concluant cet album avec conviction.

Mine de rien, l’album Unreal Unearth a été tout un voyage à travers l’éventail musical de Hozier, qui se défend plutôt bien dans plusieurs registres. C’est difficile de résumer un tel album, qui va un peu dans toutes les directions, mais qui parvient à le faire avec une certaine assurance malgré tout et qui offre une bonne dose de chansons solides, qui conviendront dans différents contextes. Comme dans tous les albums un peu trop longs, on souligne que certaines chansons auraient pu être coupées, mais ici on reconnaît qu’à peu près tout avait sa place d’une façon ou d’une autre. On aurait peut-être seulement revu le pacing de l’opus, qui a misé sur beaucoup de chansons plus douces vers la fin de l’album, créant une drôle de dynamique. Mais, chose certaine, on ne peut pas dire que Hozier n’aura fait qu’une bonne chanson dans sa carrière.

À écouter : De Selby (Part 2), All Things End, Butchered Tongue

7,9/10

Par Olivier Dénommée


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