
Par Olivier Dénommée
On n’en a pas eu assez de l’écouter interpréter le Concerto pour piano de Lucija Garūta dimanche avec l’Orchestre Métropolitain, alors on a été voir une seconde performance de la pianiste Élisabeth Pion, le mercredi 24 janvier, à l’église Sacré-Cœur-de-Jésus de McMasterville, tout près de son patelin – elle est originaire d’Otterburn Park, juste de l’autre côté de la rivière Richelieu.
Cette fois, elle s’est donné pleine liberté dans le programme de son récital, allant du baroque à du contemporain, qu’elle a d’ailleurs gardé secret jusqu’au début du concert, une pratique encore peu commune dans le milieu classique. Ainsi, tout le monde dans la salle était en mode découverte.
Élisabeth Pion a promis de la belle musique et elle a tenu parole : son récital a commencé avec 2 transcription de Bach faites par Wilhelm Kempff, une bien belle entrée en matière passant d’une certaine douceur à une pluie de notes. Le plus impressionnant était probablement d’apprendre après le récital qu’elle n’a travaillé ces pièces que dans le dernier mois et demi, chose qu’il était impossible à deviner (à titre de référence, son travail sur le concerto joué quelques jours plus tôt aura pris près de 2 ans).
Puis, dans un registre plus classique, elle a joué du Hélène de Montgeroult, grande compositrice française contemporaine de Mozart, puis du Schubert. Montgeroult fait partie de ces musiciennes de grand talent qui n’ont pourtant pas été retenues par l’histoire, éclipsées par des hommes, mais que la pianiste s’évertue de faire découvrir à travers ses performances. En écoutant sa Sonate en fa dièse mineur, on constate effectivement que cette composition n’est pas moins forte que n’importe quelle des grands compositeurs de l’ère classique. C’est donc une belle découverte proposée par Élisabeth Pion ici. Quant à Schubert, il se passe de présentation, mais sa musique est toujours tellement agréable à écouter qu’on en redemanderait! C’était la conclusion parfaite pour cette première partie du spectacle.
Une petite entracte plus tard, c’est avec Schumann que la machine est repartie à travers Sonate no 2 en sol mineur. J’ai toujours préféré Schubert au style de Schumann, mais cette composition est une de ses plus belles œuvres, où il a su se montrer plus vulnérable, particulièrement durant le second mouvement. Nul besoin de répéter que la pianiste a bien rendu justice à cette œuvre nuancée.

Elle a osé un peu plus avec Chaconne de Sofia Asgatovna Gubaidulina. Cette contemporaine toujours vivante a composé une œuvre aux influences religieuses, mais ce qu’on retient le plus est la musique corsée et tendue à souhait, qui a été interprétée sans broncher malgré la complexité apparente de l’œuvre. Un peu en réponse à Chaconne, Élisabeth Pion a conclu avec Tico-Tico no Fubá de Zequinha de Abreu, pièce qui a plus tard été popularisée par des chanteuses populaires comme Alys Robi au Québec. Cette fois, c’est une transcription par Marc-André Hamelin qui a été jouée, une interprétation légère et ludique, que la pianiste a jouée avec un large sourire. Sa dernière note a aussi suscité un «oh!» général dans l’église, suivi d’une ovation. C’est ainsi que son récital s’est terminé, mais la soirée n’était pas encore tout à fait terminée : Élisabeth Pion s’est prêtée au jeu d’une sympathique session de questions-réponses, une façon pour elle de démocratiser le classique. Ça nous prend davantage d’initiatives comme celles-là.
Après avoir vu 2 fois Élisabeth Pion en 4 jours, promis, je prends un petit break!
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