DeBÍ TiRAR MáS FOToS – Bad Bunny

Sorti 5 janvier 2025

On a peut-être vu passer le nom de Bad Bunny (nom de scène du Portoricain Benito Martínez) une fois, comme collaboration dans une chanson hip-hop qui ne nous avait pas du tout accroché, avant qu’il soit soudainement sur toutes les lèvres à l’annonce qu’il ferait le spectacle de la mi-temps au prochain Super Bowl en 2026. Au-delà de la «controverse», on a découvert qu’il a fait paraître son 6e album solo en tout début d’année et que plusieurs publications importantes ont mi DeBÍ TiRAR MáS FOToS (ou J’aurais dû prendre plus de photos en français) au sommet des meilleures sorties de 2025. Pour notre toute dernière critique de l’année, voyons voir si on peut trouver ce qui a charmé ces critiques.

Tout d’abord, les styles de cet album : Wikipédia nous apprend qu’il contient différentes sous-genres de musique associés à la musique folklorique portoricaine (plena, jibaro, bomba, salsa), du reggaeton (par ailleurs aussi très populaire à Porto Rico) et du house, le tout chanté en espagnol. Cela nous donne une bonne heure bien chargée de chansons qui alternent entre qu’on appelle assez largement la «musique du monde» et la grosse musique de club avec du beat et du rap répandu un peu partout. Dans tous les cas, ça fait un opus d’où la chaleur émane, une ambiance aux antipodes de la température où on l’écoute aujourd’hui ou même que l’on peut s’attendre d’avoir un 5 janvier…

NUEVAYoL ouvre cet album, nous mettant bien vite dans le bain. Si on reconnaît les influences folk locales dans les choix musicaux, la musique urbaine prend vite le dessus. On n’est déjà pas naturellement le critique s’intéressant le plus aux textes, mais comme on ne parle pas espagnol, on n’aurait pas pu faire autrement ici alors qu’on n’a aucune idée si Bad Bunny chante d’une recette de soupe aux pois ou d’un vol de banque qu’il s’apprête à faire (apparemment, il chante en fait sur les défis de garder l’identité portoricaine face à une modernisation qui menace cet héritage), alors on ne s’avancera pas du tout sur les thèmes abordés ici pour simplement se concentrer sur la musique et la vibe de l’album. Ici, c’est un hybride qui n’est pas inintéressant, mais la fin de la piste (les 30 dernières secondes en particulier) gâchent un peu notre expérience.

On a par la suite droit à des morceaux reggeaton et house plus «typiques», comme VOY A LLeVARTE PA PR, PERFuMITO NUEVO (en duo très efficace avec RaiNao), VeLDÁ (avec Omar Courtz et Dei V, peu intéressant pour nous), l’extrait EL CLúB (contenant quelques très bons passages, mais aussi d’autres beaucoup moins mémorables), KETU TeCRÉ (musicalement assez convaincant, malgré des choix artistiques qui nous plaisent moins), la plus lente et sentie BOKeTE, KLOuFRENS et EoO. De l’autre côté, il y a des chansons qu’on pourrait imaginer passer dans un restaurant de bouffe issue de l’Amérique latine, notamment la solide BAILE INoLVIDABLE (malgré sa longueur de 6 minutes!), dans une moindre mesure WELTiTA (avec Chuwi), TURiSTA (ok, ce mot-là on le reconnaît!), CAFé CON RON (si on oublie les ajouts d’effets plus ou moins utiles), PIToRRO DE COCO, LE QUE LE PA A HAWAii, la presque chanson-titre DtMF (il s’agit de l’abréviation du titre de l’album), et la dernière LA MuDANZA.

Cela donne une variété somme toute intéressante, même si la qualité des chanson peut varier beaucoup d’une piste à l’autre. Plus vous êtes ouverts envers la musique urbaine, plus vous allez pouvoir apprécier les propositions de Bad Bunny, sinon vous risquez de trouver le temps long parce qu’on parle d’un opus de 62 minutes après tout!

Mais comment résumer notre écoute de DeBÍ TiRAR MáS FOToS? C’était, tout d’abord, beaucoup moins pénible que ce qu’on appréhendait, même si on n’a pratiquement aucune affinité avec ce registre. On a notamment découvert que Bad Bunny est capable de nuances et de diversité dans les styles abordés, ce qui fait en sorte qu’il peut rejoindre un public beaucoup moins niché que s’il s’adressait à une frange précise. Mais malgré tous les efforts qu’on peut faire, on ne voit pas comment cette sortie pourrait être parmi les incontournables de 2025, peut-être à part si on est spécialisé dans la musique latine. On n’est pas déçu de s’être prêté au jeu de l’écouter, mais on fera, comme c’est souvent le cas, cavalier seul en ne retenant pas cette sortie dans notre liste de fin d’année. Ce qui n’empêche évidemment pas de l’apprécier et de l’écouter si vous voulez oublier les températures nordiques et la neige un instant!

À écouter : BAILE INoLVIDABLE, PERFuMITO NUEVO, TURiSTA

7,4/10

Par Olivier Dénommée


En savoir plus sur Critique de salon

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.