Le ciment des âges – Georges Ouel

Sorti le 3 novembre 2023

À la sortie de son premier album Les monomanies du bonheur, face A, on laissait entendre que l’auteur-compositeur-interprète Georges Ouel allait faire paraître une face B… C’était à l’automne 2019, soit quelques mois avant que bien des choses changent. Ainsi, on se retrouve 4 ans plus tard, avec un tout autre album, intitulé Le ciment des âges. Mais même si le temps a passé, on reconnaît tout de suite la signature de Ouel.

«Le ciment des âges, c’est le constat du temps qui passe et qui fait son travail, qu’on le veuille ou pas. C’est un coup d’œil vers l’arrière au-dessus d’une épaule qui ne voudrait pas vieillir. C’est le temps qui défile, c’est une poignée de main sincère qui s’accroche à ce qu’elle peut. C’est une louange qui chérit ce qui en valait la peine et c’est aussi l’échec qui voudrait bien rêver de liberté. Nos intervalles se figent dans le ciment et les âges se confrontent dans l’ineptie. On dira ce qu’on voudra, l’important c’est l’amour», affirme l’artiste au sujet de cet album. Cette poésie traduit bien le ton qu’emprunte le musicien de Saint-Hyacinthe (ça sera important plus tard!), et semble bien correspondre à un état d’esprit qui accable bien des personnes depuis la pandémie – la composition des 9 nouvelles chansons ont été faite ces 3 dernières années, apprend-on.

Versant davantage dans la chanson à texte qui n’est pas sans rappeler Georges Brassens (similitude qui le suit depuis ses débuts, mais qui demeure toujours vraie), la musique arrive généralement en second plan. Cela ne l’empêche quand même pas d’offrir quelques arrangements bien sentis au fil de ce bref opus folk (28 minutes). Notons que la réalisation est d’ailleurs confiée à un autre Maskoutain, Alex Burger.

Cela donne des chansons où la voix de Georges Ouel est généraleent feutrée, mais avec des arrangements qui donnent une autre dimension aux compositions. C’est le cas pour Crevette, Tendinité, Oiseaux (à la fois berçante et bluesy, si une telle combinaison est possible), Harmonica (qui se transforme en tango drôlement réussi), ou encore la final Tsunami.

On a aussi droit à des passages comiques, comme la légère et brève Pétanque, qui finit avec des paroles de sagesse : «Viens j’ai un sport pile à ta pointe / Là où il n’y a pas d’animosité / Où on ne connaît que l’amitié / La pétanque c’est un sport d’amour».

Parmi les chansons les plus fortes de l’album, on ne peut passer à côté de la mélancolique et très poétique Au pays des cabots. Aucun mot ne peut décrire avec justesse la chanson, qu’il vaut mieux écouter pour en saisir la portée. Et que dire de Fou des Cascades? Ouel parvient à écrire une toune d’amour sur fond de crise du logement, en faisant référence à la rue des Cascades à Saint-Hyacinthe, ET à faire en sorte que c’est probablement la plus marquante de l’album, ce qui n’est pas rien. Chapeau aussi aux arrangements, qui servent bien les textes et la mélodie.

Mention également à Sans faute, qui commence comme une chanson à la Brassens, mais où les paroles disparaissent après une minute pour laisser place à une longue portion instrumentale très sympathique. Il y a vraiment une recherche de l’équilibre entre les textes parfois chargés et la musique généralement plus facile à digérer.

Comme dit précédemment, l’écoute de l’album complet n’est pas bien longue, ce qui fait que l’on se surprend de déjà revenir au début de l’album lorsqu’on l’écoute en boucle. Georges Ouel n’aime visiblement pas produire des albums plus longs que nécessaire, et Le ciment des âges a l’avantage d’avoir une certaine cohésion malgré la variété musicale d’une chanson à l’autre. Évidemment, certaines pistes sortent davantage du lot individuellement et d’autres nous laissent un peu plus indifférent, mais le travail prend tout son sens lorsqu’il est écouté en intégralité. Nous avons hâte de voir comment se poursuivra son évolution, et souhaitons-nous au passage qu’on n’aura pas d’autre pandémie à traverser avant sa prochaine sortie.

Les chansons de cet album peuvent être écoutés sur Bandcamp, entre autres.

À écouter : Au pays des cabots, Fou des Cascades, Oiseaux

7,8/10

Par Olivier Dénommée


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