Le ciel est beau regarde les nuages – Laurence Nerbonne

Sorti le 29 mars 2024

Chaque année, il y a une espèce de concours pour prédire quelle sera la «chanson de l’été», une toune plus énergique et ensoleillée que toutes les autres qui va être massivement jouée à toutes les radios commerciales pendant la belle saison. On ne se risquera pas à faire telle prédiction, mais on peut dire que la quasi-totalité du 4e album de Laurence Nerbonne, Le ciel est beau regarde les nuages, pourrait présenter sa candidature pour cet été. Si on avait eu un vrai hiver cette année, on aurait trouvé qu’il était un peu trop tôt pour lancer des tounes d’été, mais cet argument est un peu invalide en 2024, alors…

Justement, la première piste de l’album, Rainbow, risque de résonner beaucoup, même si elle nous paraît un peu «facile» : musicalement, imaginons un mélange entre Copilote de FouKi et Jay Scøtt et I’m Yours de Jason Mraz, mais avec les mots «Somewhere over the rainbow» (des paroles archi connues et clichées) répétés pendant les refrains. L’ironie est que la chanson se veut une ode à la différence, alors qu’elle sonne exactement comme trop d’autres chansons! Ceci étant dit, les chansons estivales qui ont le plus de succès sont rarement celles avec le plus de profondeur. Notons quand même que l’énergie de Rainbow revient presque à l’identique un peu plus loin, avec Dans mon mind (mais avec un refrain à notre avis un peu plus réussi).

Chat sauvage est parmi les chansons les mieux dosées de l’album, avec une solide collaboration du rappeur Koriass. La chanson traîte d’amour et d’autodestruction, des thèmes qui sont très récurrents au fil de l’opus (avec Thérapie, des montagnes russes entre des couplets légers et des refrains plus émotifs, ou encore Cold où la chanteuse semble désespérée d’avoir l’attention d’une autre personne), ce qui tranche avec l’énergie de la musique. Elle est suivie de la très ensoleillée Hometown, dégoulinante de nostalgie sur fond plus folk à la Jack Johnson. Plus loin, On danse encore tente d’insuffler une dose de positivisme dans une ère dominée par une planète qui ne va pas bien et par une dépendance aux technologies de plus en plus forte. On se montre critique de plusieurs choix artistiques de Laurence Nerbonne dans cet album, mais il faut admettre que c’est très accrocheur ici. Parlant de dépendance à la technologie, Addict aborde le même thème, mais spécifiquement dans le contexte d’une nouvelle relation amoureuse. On ne pourra pas dire qu’elle ne s’assume pas.

Cowgirl est une forme d’hommage à Bye bye mon cowboy de Mitsou, la chanson qui a lancé sa carrière. Au cas où c’était trop subtil, elle a même fait appel à Mitsou elle-même pour collaborer à la chanson! Le duo propose ainsi une chanson «country rap» qui invite «toutes les cowgirls de ce monde à prendreles rênes de leur destin et à bousculer les codes pour écrire leur propre scénario». Le message d’empowerment est fort, mais la chanson n’est pas mémorable outre mesure. Quant à Serpents, on multiplie les références à la culture populaire au point où on peinerait d’en nommer la moitié, mais on note les sonorités à la Pump It des Black Eyed Peas qui sont parmi les moins subtiles (en plus, le groupe est nommé dans la chanson). L’album se termine avec Je ne sais quoi, une ballade amoureuse un peu trop cheesy, même pour nous (ce qui n’est pas peu dire!). C’est aussi un drôle de choix de clore sur cette chanson plus douce, alors qu’il aurait été naturel de choisir quelque chose qui correspond mieux à la vibe générale de l’album.

Difficile de dire ce qui nous dérange le plus dans cet album, mais dès la première écoute, on savait que ça le cliquerait pas particulièrement, même après avoir laissé le temps de les apprivoiser. Peut-être est-ce en partie parce qu’on préfère les chansons plus émotives et introspectives que ce que propose Laurence Nerbonne, ou que l’album prendra vraiment tout son sens quand l’été sera là pour vrai, mais le côté prévisible de plusieurs chansons (rien de pire que d’écouter une toune pour la première fois et d’avoir l’impression de déjà la connaître par cœur) et le traitement trop léger de certains thèmes sérieux influencent énormément notre jugement. Après, cela n’enlève absolument rien à ceux qui apprécieront ces chansons et qui les écouteront en boucle; on n’en fera tout simplement pas partie.

À écouter : Chat sauvage, Dans mon mind, On danse encore

6,5/10

Par Olivier Dénommée


En savoir plus sur Critique de salon

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.