
Sorti le 7 juin 2024
Ceux qui, comme nous, suivent le groupe finlandais Apocalyptica depuis longtemps se souviennent de ses débuts comme groupe de covers de Metallica joués au violoncelle. Cela a d’ailleurs mené à son premier album, Plays Metallica by Four Cellos en 1996. Le groupe s’est peu à peu distancé des reprises afin de prioriser ses propres compositions, mais Metallica ne l’a jamais tout à fait quitté et certains incontournables font toujours partie des spectacles. Il a semblé naturel de revenir à leurs premières amours avec Plays Metallica, Vol. 2, un nouvel album uniquement consacré à cette musique.
Si le premier album avait mis Apocalyptica sur la carte, la qualité de la production n’était pas au même niveau qu’elle peut l’être aujourd’hui; déjà, ce n’est pas une mince commande de recréer une énergie métal avec simplement des violoncelles. Avec le temps, ça s’est grandement peaufiné et on a pu entendre des versions très réussies des chansons de Metallica, dont l’incontournable Nothing Else Matters. L’ajout d’une batterie dans plusieurs chansons est aussi un bon point et c’est ici la dernière fois qu’on a la chance d’entendre Mikko Sirén, qui a quitté le groupe plus tôt en 2024. Ajoutons à cela un sceau d’approbation indéniable : la collaboration de 2 membres de Metallica, le bassiste Robert Trujillo et le frontman James Hetfield lui-même! Bref, tous les éléments sont en place pour un solide album dédié à Metallica.
… Enfin, presque tous les éléments. La plupart des chansons incontournables de Metallica ont déjà été reprises à un moment ou un autre, ce qui laisse des chansons un peu moins fortes ou reconnaissables instantanément dans plusieurs cas. Heureusement, on commence avec force avec Ride the Lightning (on devine que c’est c’est d’ailleurs l’album du même titre qui a inspiré la pochette de Plays Metallica, Vol. 2), où le groupe s’amuse à jouer avec le tempo au début, lui donnant un côté plus solennel. Apocalyptica se permet même d’ajouter un clin d’œil à For Whom the Bells Tolls (une chanson déjà reprise par le passé), en y incorporant des petits passages de son débuts avec des sons de cloches. On a remarqué que plusieurs références du genre ont lieu au fil de l’album, ce qui est un bon coup de la part du groupe. Sinon, la reprise correspond parfaitement à ce à quoi on pouvait s’attendre d’une reprise par Apocalyptica : c’est réglé au quart de tout et on sent bien la fougue de la version originale.
S’ensuit St. Anger, chanson pour laquelle on a très peu d’affection, mais compte tenu du matériel de base, il faut reconnaître que la nouvelle version amène un vent de fraîcheur particulièrement bienvenu. The Unforgiven II est une autre des chansons plus «récentes» de Metallica, permettant à Apocalyptica de mettre à profit la finesse de ses instruments. Si la composition n’a pas exactement la même force que The Unforgiven, le rendu se défend très bien et on sent tout le long de l’interprétation la proximité avec la précédente version.
Blackened n’avait encore jamais été enregistrée par Apo, et il fait ici appel à un ami de longue date, le batteur Dave Lombardo pour ajouter à l’intensité de l’interprétation, sans trop se démarquer de la version originale. En revanche, The Call of Ktulu est intéressante puisqu’elle est à la base une pièce instrumentale, permettant pleinement à Apocalyptica de briller avec certains passages ambiants très réussis. The Four Horsemen est parmi les plus vieilles chansons de Metallica, et pour l’occasion Robert Trujillo a apporté sa contribution à cette version plus peaufinée – Metallica ne faisait pas tant dans la finesse à ses débuts, ce qui avait son charme, mais qui ne vieillit pas toujours bien – qui vaut le détour. On poursuit avec Holier Than Thou, une des chansons qu’on apprécie le moins du Black Album, et donc la nouvelle interprétation très intense ne suffit pas à nous convaincre. Tout de même, mentionnons le passage réussi vers la fin où on reconnaît Enter Sandman, classique parmi les classiques!
To Live Is to Die propose une version très allégée (3 minutes au lieu de presque 10), mettant l’accent sur la beauté mélodique du morceau. On a vraiment l’impression d’être complètement ailleurs ici. Elle mène à la finale de l’album, One. La chanson est spéciale pour 3 raisons : la première, parce qu’elle a déjà été reprise avec une précision chirurgicale sur l’album Inquisition Symphony. La deuxième, parce que Trujillo et James Hetfield y ont collaboré. Et la troisième, parce que l’on a été complètement ailleurs dans l’énergie, y incorporant des éléments orchestraux et réussissant à allonger une chanson déjà longue, passant de 7 à 9 minutes! L’introduction est trop longue et aurait bénéficié d’être coupée d’au moins 2 minutes, ce qui est le temps que ça prend avant de reconnaître la mélodie initiale. Après, ça laisse place à certains éléments très intéressants, comme si un orchestre symphonique se penchait sur la chanson, mais ça se gâte dans les couplets… James Hetfield récite les paroles de sa chanson avec une grosse voix profonde, mais qui fait tache avec le reste de l’ambiance créée par l’ensemble. C’est dommage parce que le groupe était content (et avec raison) de pouvoir se vanter d’avoir eu le chanteur de Metallica sur son album, mais la chanson aurait malheureusement bénéficié de son absence. Cela termine l’album Plays Metallica, Vol. 2 avec un petit goût amer en bouche.
Quand Apocalyptica était inconnu à ses débuts, ça avait du sens de miser sur la musique d’un autre groupe, mais 28 ans plus tard, on dirait que ça n’a plus la même magie, même si la plupart des reprises sont bien faites. L’album n’est pas mauvais, mais il semble s’adresser à un public très précis, celui de la première heure qui n’a toutefois jamais suivi le virage des compos originales. Comme on ne fait pas partie de ce public, on a été habitué à beaucoup plus d’émotions de la part d’Apocalyptica, ce qui est évidemment plus difficile à recréer quand on reprend des chansons agressives du début à la fin. Plays Metallica, Vol. 2 contient quelques chansons qui s’incorporeront très bien en live, mais on ne prévoit pas écouter trop souvent ses chansons.
À écouter : Ride the Lightning, The Unforgiven II, The Four Horsemen
7,0/10
Par Olivier Dénommée
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