
Par Olivier Dénommée
Il y a de ces journées où rien ne semble aller comme on le voudrait, où le moindre écueil devient un immense irritant. Mais même dans ces mauvaises journées, rien de tel qu’un bon show de musique pour se changer les idées. Et les solides performances de Charlotte Cardin et Patrick Watson à Soif de musique à Cowansville vendredi en faisaient partie.
Ceux qui suivent un peu le festival savent probablement que cette soirée était sold out depuis belle lurette, signe de l’engouement gigantesque pour Charlotte Cardin en particulier, qui semble marcher sur l’eau. Je m’attendais donc à un achalandage encore plus intense qu’à la soirée de mercredi, qui n’avait «que» Rise Against et Pennywise en têtes d’affiche et c’était bel et bien le cas. D’ailleurs, une des frustrations du jour était de trouver du stationnement, mission pratiquement impossible comme je ne suis pas arrivé assez tôt pour les performances d’Emma Beko et de Soran, et ensuite d’entrer sur le site alors que des centaines de personnes tentaient d’entrer en même temps pour ne pas manquer Patrick Watson. Et c’est sans compter le défi de rejoindre mon groupe d’amis quelque part au milieu de la foule déjà en sueur… Vraiment, le show avait intérêt à être excellent!
Patrick Watson
Mettons fin au suspense tout de suite : le show était vraiment solide. Je n’ai pas souvenir d’avoir déjà vu Pat Watson en spectacle, mais j’entends encore parler de son spectacle dans une église en 2013 et mes attentes étaient plutôt élevées. À Soif de musique, il était entouré d’une petite armée de musiciens, incluant la présence notable de la chanteuse Ariel Engle (La Force) à ses côtés. Même sans connaître l’ensemble de son répertoire, il était facile de se laisser envoûter par sa musique gravitant généralement autour de son piano.
Je ne sais pas si c’est quelque chose qu’il fait souvent, mais il y avait 2 Patrick Watson sur scène ce soir-là : un dans sa bulle, jouant et chantant ses chansons souvent les yeux fermés, et celui plus déjanté, qui dit des folies entre les chansons et descend dans le public pour créer un moment plus interactif. Dommage, son porte-voix n’a pas bien fonctionné et il n’a été possible que de deviner ce qu’il voulait nous dire, mais l’énergie était bien là. Et il a conclu son spectacle par nous dire que sa «vie est un crisse de désastre» (citation exacte) pour présenter Here Comes the River, une des pièces incontournables de son album Wave, un moment fort de la soirée. Il a décidément ce don de faire rire un instant et nous toucher juste après. On était certainement plusieurs à en vouloir plus, mais on savait aussi ce qui suivrait…

Charlotte Cardin
Entre les deux sets sur la scène principal, il y a eu quelque peu de mouvements de foule. Ceux qui venaient uniquement pour Watson se sont éloignés ou sont tout simplement partis, mais l’assistance s’est drastiquement rajeunie, avec beaucoup de jeunes adolescentes qui prenaient la place au milieu de la foule de plus en plus compacte pour voir Charlotte Cardin. Et on ne peut pas dire que la foule manquait d’énergie, elle qui criait à presque chaque occasion : Charlotte qui arrive, Charlotte qui commence à chanter, Charlotte qui s’adresse au public, Charlotte qui prend sa guitare, même Charlotte qui fait une petite erreur! Ceci étant dit, je préfère un public enthousiaste qu’un public irrespectueux, comme on en voit trop en festival. Notons qu’il y avait beaucoup moins d’objets lancés et de canettes par terre vendredi que mercredi, même si plus de gens étaient sur place vendredi…
Musicalement, peu de choses à redire sur le choix des chansons : elle a fait un bon survol de sa discographie, alternant assez efficacement entre les chansons très énergiques, les ballades émotives et les chansons plus sensuelles. Cela me ramène tout de même à commenter l’âge du public : ça fait bizarre de penser qu’autant Charlotte Cardin est sincèrement émerveillée d’avoir d’aussi jeunes fans, dont des filles prépubères qui la voient comme un modèle, autant elle peut se déhancher de façon très sensuelle dans certaines chansons. D’ailleurs, Sex to Me faisait partie de la liste des chansons, pas nécessairement une toune que j’associerais spontanément à un aussi jeune public!
Après la performance de Patrick Watson entouré de plusieurs musiciens, Charlotte Cardin n’était toutefois qu’avec 2 musiciens et a visiblement compté sur des séquences pour meubler ses chansons. Ça n’a pas paru dans le son qui se rendait à nos oreilles, mais cette formule enlève sûrement un peu de spontanéité dans l’interprétation des chansons. C’est d’ailleurs dans les parties plus dépouillées qu’elle se démarquait le plus, notamment lorsqu’elle était derrière le piano en solo.

La fin du spectacle était un peu prévisible, mais en rappel, Charlotte Cardin a invité Patrick Watson à revenir sur scène, le temps d’une chanson écrite ensemble sur son dernier album, 99 Nights. On pouvait difficilement demander mieux comme finale.
Bilan de la soirée : fatigué, mal aux pieds et perdu la voix (déjà maganée à cause de mercredi, faut-il avouer), mais je le referais n’importe quand.
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