Métal canadien-français – Mononc’ Serge et Anonymus

Sorti le 6 novembre 2024

Pouvez-vous croire que cela faisait déjà 16 ans que Mononc’ Serge et Anonymus n’avaient pas lancé un album studio ensemble? Il faut dire qu’ils ont certainement été assez occupés chacun de leur côté, mais les sorties communes sont toutes devenues cultes par le passé. Et ce 3e album, Métal canadien-français, a aussi le potentiel de l’être.

On commence en force avec une bonne grosse dose d’autodérision : La ligue du vieux pouèl, jeu de mots avec «Ligue du vieux poêle», se moque du fait que les musiciens, aujourd’hui dans la cinquantaine, essaient encore de faire du métal, malgré leur âge vénérable. On retient les lignes «Quand t’es vieux pis qu’tu fais du métal, t’essaie d’avoir l’air méchant, mais t’as juste l’air cave», répétées à la fin de façon de plus en plus agressive. Ceci étant dit, il faut reconnaître que les gars d’Anonymus l’ont toujours autant.

On enchaîne avec la chanson-titre Métal canadien-français, résumant assez bien l’expérience d’écouter un album de métal canadien… en français. Les riffs sont très solides, mais la chanson n’a pas le même charme que d’autres chansons. La nostalgie est aussi au rendez-vous pour les amateurs de hockey dans La bataille du Vendredi Saint, rappelant le fameux match de série qui a dérapé en bagages générales entre les Canadiens et les Nordiques en 1984. On retrouve Mononc’ Serge à son meilleur dans Moé mais en mieux, faisant l’éloge de la cocaïne et de ses nombreux bienfaits. On se souvient de ses chansons sur la marijuana ou sur la cigarette (on fredonne encore parfois Hostie de bonne smoke même si on n’a jamais fumé), alors on reconnaît assez rapidement son pattern ici, pour notre plus grand plaisir!

Retour à l’autodérision avec l’excellente La guerre de la technologie, reconnaissant qu’il est plus facile que jamais de faire de la bonne musique à l’aide des programmes et de l’intelligente artificielle par rapport à jouer avec des vrais musiciens plein de défauts. Comme à son habitude, Anonymus répond en livrant ses riffs de feu. La suivante, Hommage aux hommages, est probablement notre préférée de tout l’album : moins brutale que les autres, elle salue les groupes hommage à d’autres artistes, parce que c’est ça «que le monde veule» plutôt que des compositions pas bonnes. En prime, on a droit à quelques clins d’œil, comme une ligne rappelant la guitare de Sweet Child O’ Mine de Guns N’ Roses et la phrase «On a mis quelqu’un au monde, on devrait peut-être lui rendre hommage» (basé sur Un musicien parmi tant d’autres d’Harmonium). Vraiment très, très réussi!

Il est rare que Mononc’ Serge chante en anglais, mais c’est presque toujours très drôle, surtout lorsqu’il nous livre Shitty Accent, qui veut dire exactement ce que vous pensez : il rit de son terrible accent québécois qui lui nuit pour une carrière à l’international. S’ensuit Tuer du monde, qui rejoindra possiblement les amateurs de jeux violents comme Grand Theft Auto, mais qui manque peut-être un peu de nuance, si c’est quelque chose de possible! Commentaire similaire pour J’parle vrai, mais qui devrait toutefois lever en spectacle avec son segment «chanson à répondre». La chanson se conclut avec les mots «S’a coche», enchaînant aussitôt avec la chanson S’a coche. Après avoir ri de l’âge et du manque de fiabilité des musiciens, ils se rattrapent en affirmant fièrement que «Nous autres on est toujours s’a coche».

Biloubiloubilou (qui doit être prononcé très rapidement pour un maximum d’effet), rit cette fois des gars d’Anonymus qui savent juste faire «de la marde vite». On ne change pas une formule gagnante! La conclusion de l’album suit avec Bonne année, soulignant à peu près toutes les fêtes au fil de l’année avec leur regard décalé. Le tout culminant évidemment avec le Nouvel An. Au moment de la sortie, l’année 2024 était déjà bien entamée, mais il faut dire que la phrase «Encore un autre année d’marde» chantée en chœur vers la fin peut difficilement sonner plus vrai pour bien des personnes!

Cela fait plus de 20 ans que Mononc’ Serge et Anonymus collaborent de façon plus ou moins sporadique, et la formule est éprouvée depuis longtemps. Il reste donc assez peu de surprises à avoir en écoutant Métal canadien-français, mais cela reste toujours un petit bonbon à écouter en boucle. Dans notre cas, certaines chansons nous atteignent beaucoup moins de par leur propos, mais dans l’ensemble cela reste un solide album qui devrait à peu près aussi bien vieillir que les précédents.

À écouter : Moé mais en mieux, La guerre de la technologie, Hommage aux hommages

7,8/10

Par Olivier Dénommée


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