Portraits de famine – Philippe Brach

philippe-brach-portraits-de-famineSorti le 4 septembre 2015

Philippe Brach est un de ces ovnis musicaux qui commencent de plus en plus à être incontournables au Québec. Ce personnage éclaté et parfois décousu est un spectacle en soi et ses aspirations musicales et poétiques peuvent de plus en plus difficilement être ignorées même par le grand public… surtout quand son deuxième album, Portraits de famine, est réalisé par Louis-Jean Cormier.

Après une étrange intro, on découvre un folk-rock à tendance blues sur Né pour être sauvage, avec des textes dotés d’une certain poésie difficile à cerner, mais rafraîchissant à la fois. On apprend assez rapidement à l’apprécier, même quand on ne saisit pas complètement ce qu’il tente de nous dire. Le mystère fait partie du charme de l’artiste.

Crystel est une des pistes plus connues de l’album, ayant tourné à la radio. Avec raison : cette chanson énergique et fort bien arrangée (les cordes occupent juste assez de place) passe très vite et ses paroles, plus conventionnelles, troubleront moins d’auditeurs. La chanson est suivie par une collaboration avec Klô Pelgag : Si proche et si loin à la fois est plus discret dans ses arrangements pour laisser toute la place pour les deux voix, qui se marient finalement très bien… on en aurait redemandé. Alice, autre chanson douce, restera en tête, comme une des plus belles de tout l’opus.

À partir de Monsieur le psy, Philippe Brach semble commencer à oser plus. Cette chanson lente offre une très belle progression, mais se lance dans un refrain qui sonne plus forcé mélodiquement, qui laisse une expérience mitigée. Le chanson de ton dans la dernière minute rend aussi la chanson légèrement trop chargée pour ce qu’on aurait voulu. Puis vient l’entraînante Bonne journée, chantée essentiellement a capella avec seulement un claquement de doigt comme accompagnement. Un message chargé mais clair, dans un format drôlement entraînant. Après la chantante L’Amour aux temps du cancer, on a droit à Divagation parlementaire, où il n’est pas très clair si Brach est un député, ou un avocat, ou un humoriste. Cette interlude mène à l’énergique D’amour, de booze, de pot pis de topes, où il passe visiblement à la vitesse supérieure avec une chanson groovy mais un peu trop chargée : plusieurs écoutes permettront d’apprivoiser ce gros morceau de l’album.

Et après des chansons moins mémorables, on retiendra finalement Ton silence m’aspire et la finale Le bonheur tousse moins qu’avant, deux morceaux au tempo lent, laissant place, une dernière fois, au sens de la mélodie de Brach.

Les quinze pistes de l’opus sont généralement assez brèves – la plupart tourneront autour de trois minutes – et même si on n’accroche pas particulièrement sur une chanson, on peut se rattraper sur la suivante. C’est une bonne chose dans la mesure où l’univers de Philippe Brach est assez éclaté et qu’il nous amène un peu partout pendant ces trois quarts d’heure, mais aussi dommage parce que certaines excellentes pistes s’achèvent trop vite et on en aurait redemandé davantage! Somme toute, Portraits de famine est solide, et offre une belle incursion dans la tête du personnage qu’on apprendra à connaître au fil des ans. Pour un deuxième album, on sent déjà qu’il y a quelque chose de très sérieux et que l’artiste en sera un à surveiller de près dès qu’il sortira quelque chose de nouveau.

L’album Portraits de famine est disponible sur Bandcamp.

À écouter : Crystel, Si proche et si loin à la fois, Alice

7,9/10

Par Olivier Dénonnée


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