Quintissime – Yvan Belleau

Sorti le 5 septembre 2023

Musicien et compositeur résidant à Mont-Saint-Hilaire, Yvan Belleau n’avait pas sorti de nouvel album depuis 10 ans quand l’étincelle lui est venue pour ce qui deviendrait Quintissime, son quatrième album. Formé à la fois en classique et en jazz, il a adopté la clarinette comme instrument de prédilection et a voulu offrir un album jazz où cet instrument généralement boudé était bien mis en valeur. Et il s’est entouré pour l’occasion de plusieurs grosses pointures pour l’accompagner : Norman Lachapelle (basse), Guillaume Martineau (piano), Yvon Plouffe (batterie) et Sylvain Provost (guitare).

Les influences classiques d’Yvan Belleau s’entendent somme toute assez bien au fil de l’opus de 9 titres. Le début de l’album démarre très doucement, pour laisser le temps d’apprivoiser le son de la clarinette et incorporer petit à petit les autres instruments. Inclusion, par exemple, laisse quelques secondes à la clarinette d’Yvan Belleau en solo avant d’ajouter d’autres couleurs, à l’exception de la batterie qui restera silencieuse pendant quelques pistes. Mais ce n’est pas un album où tout le monde va s’empêcher de jouer pour laisser toute la place au frontman : quelques solos se sont entendre et on retrouve avec plaisir la guitare «chantante» de Sylvain Provost.

L’album s’écoute un peu comme une suite, où on sent que la fin d’une pièce nous guide naturellement vers la suivante. La brève Accointances (à peine 2 minutes!) nous donne le sentiment qu’on a déjà envie d’aller plus loin dans le degré d’intensité, mais qu’on se retient encore un peu avant d’exploser : et c’est à partir de Corporation créative que le band est vraiment complet avec l’arrivée en scène d’Yvon Plouffe, qui a un jeu qui n’est pas sans rappeler le jazz scandinave. On arrive à créer à la fois une pièce contemplative dans sa mélodie et explosive dans son interprétation.

Après avoir laissé échapper la pression, Homme d’étincelles revient à davantage de douceur, avec un morceau à écouter les yeux fermés. Cela n’empêche évidemment pas Yvan Belleau de livrer un solo bien senti dans la deuxième moitié de la pièce, juste après une improvisation feutrée de son bassiste. Ça rend la suivante, Transformation, encore plus marquante par son énergie sans retenue. C’est d’ailleurs ici qu’on a droit à certains des solos les plus assumés de l’album. Le seul défaut d’une pièce intense comme celle-ci est qu’elle se termine un peu sec à notre goût!

La touchante (mais trop brève) Étincelles nocturnes laisse ensuite place à Feux follets, qui fait soudainement passer Transformation pour une berceuse avec son intensité à 11. Ça laisse place à des rafales de notes à travers divers solos réussis, mais s’il y avait un intrus à souligner dans cet album, ça serait cette piste.

Dernière pièce douce de l’album, Latence nous offre un magnifique moment piano/clarinette. Guillaume Martineau arrive presque à voler la vedette ici! Et il y a quelque chose de très familier avec la mélodie de clarinette qu’on entend à divers moments, mais on n’a pas réussi à mettre le doigt sur quoi exactement!

On garde le dessert pour la fin, avec la contagieuse pièce-titre Quintissime. Rythmée et entraînante à souhait, on y offre le meilleur de la technique de l’ensemble et du côté très mélodique dont tous les musiciens sont capables. On se permet aussi d’inviter le temps d’une pièce Alain Juteau à la guitare électrique. Bon choix de clore l’opus avec celle-ci.

Pour un album aussi bien dosé que Quintissime, il serait un peu réducteur de dire qu’il s’agit d’un bon album de jazz à la clarinette. Oui, l’instrument central est la clarinette, ce qui est de nos jours plutôt rare, mais si on plongeait dans cet album sans avoir cette information, on pourrait simplement apprécier les compositions et la chimie entre les musiciens. À aucun moment on écoute l’album en se disant «ça aurait mieux sonné si c’était un sax qui jouait à la place». C’est tout simplement un bon album de jazz, point, que nous livrent Yvan Belleau et ses musiciens et ils parviennent en plus à faire paraître ça facile pendant la majorité de l’écoute. Une bonne écoute est recommandée, et pas juste pour pour les habitués du jazz.

Cet album est notamment disponible sur Bandcamp.

À écouter : Homme d’étincelles, Latence, Quintissime

7,9/10

Par Olivier Dénommée

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