
Sorti le 29 septembre 2023
Actif depuis quelques années déjà, le groupe québécois Malaimé Soleil a fait paraître deux EP par le passé avant d’être prêt à présenter Tempête, son premier album complet. Si le titre de l’album est simple, sa musique, elle, est loin de l’être : on a affaire à une musique plutôt variable d’une chanson à l’autre, avec du de l’indie-rock, du rock alternatif, des sonorités rétros (qui ne sont pas sans rappeler ce que Jimmy Hunt et d’autres ont déjà fait avec succès) et des paroles souvent étranges.
L’écoute de cet album n’est pas excessivement long – même pas 35 minutes –, mais c’est un peu de la haute voltige comme on nous surprend avec la direction que prend la plupart des pistes. Si la musique de la première chanson, Pansement, n’a rien de trop flyé, les paroles et la mélodie nous font penser que la toune aurait pu être écrite dans un épisode de Passe-Partout qui aborde des méthodes alternatives à l’urgence pour se soigner. «Tire sur le pansement / Tire sur le pansement / Même si ça fait mal / si ça fait mal / fais sortir le méchant / sortir le méchant / ça vaut pas la peine de s’rendre à l’hôpital», chante-t-on avec une mélodie presque enfantine.
Reconnaissons quand même que si l’album Tempête n’est pas une écoute excessivement facile, certaines chansons demeurent plus accessibles. C’est le cas de l’extrait Coin coin, qui y va d’un rock sympathique (si on oublie la voix plus aiguë que nécessaire) avec même un petit solo de guitare vers la moitié, et de Porte-clé, planante dans son approche (les cha-la-la-la-la y sont d’ailleurs à l’honneur). Ajoutons Monotonie qui, malgré son titre, offre quelques passages très inspirés, incluant les bouts aux tons presque religieux avec simplement la voix et le synthétiseur. On est tenté d’aussi inclure Mots, comme la chanson est efficace et inspirée pour la majeure partie, si on arrive à oublier les petites parties plus faibles, principalement la portion percussive qui arrive vers le deuxième tiers de la chanson.
C’est là que ça se gâte un peu plus. Démons a des paroles pour le moins particulières, auxquelles on ne parvient jamais vraiment à s’habituer. Bref exemple : «Les démons ont des belles voitures / Un écran plasma a’ec des speakers su’ leurs murs». Dommage, parce que la musique rétro à souhait est très réussie dans la première moitié. Et la deuxième moitié? On passe soudainement à quelque chose de plus lourd et chargé, mais pas une seule parole ne sera prononcée dans cette partie. Une fois qu’on s’y fait, on apprécie aussi cette partie plus intense, bien qu’on a plus l’impression que c’est un interlude instrumental que la fin de Démons!
Pluie acide offre plus loin un mélange entre de la musique de stoner et du grunge. Cela donne des paroles assez «uniques» à écouter et une deuxième partie particulièrement intense. Musicalement, ça se défend très bien, mais on décroche quand la voix embarque, d’autant plus qu’on a l’impression qu’on n’arrive pas au bon nombre de syllabes pour entrer dans la mélodie.
Et, en fin d’album, la dernière minute de Minable a quelque chose de très familier. Le chanteur Francis Leclerc y emprunte un ton qui n’est pas sans rappeler la musique de Zen Bamboo, groupe qui a soudainement disparu en 2020. Drôle de façon de clore cet album, même si la chanson est tout de même assez intéressante avec une certaine dose de vulnérabilité.
Notre expérience avec Tempête a été l’inverse de celle que l’on a avec beaucoup d’albums «bonbons» qu’il nous arrive à l’occasion de critiquer : souvent, on apprécie écouter l’album un peu distraitement dans son ensemble, mais quand on l’analyse piste par piste, on finit par constater ses faiblesses. Dans ce cas-ci, l’écoute en général n’a pas été aisée, au contraire. La voix occupe une place importante dans les chansons de Malaimé Soleil et les paroles sortent un peu trop du lot pour les ignorer, ce qui n’est pas un plus pour nous. Mais écouter attentivement les chansons nous a permis de relativiser les portions moins agréables de certaines chansons qui sont somme toute quand même solides musicalement. Cet album n’a quand même rien de relaxant et s’adresse visiblement à un public niché, mais rendons à César ce qui lui revient : dans son registre bien précis, c’est un excellent album.
Tempête peut notamment être écouté sur la page Bandcamp du groupe.
À écouter : Mots, Porte-clé, Monotonie
7,6/10
Par Olivier Dénommée
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