Skylines – Patrick Krief

Sorti le 8 septembre 2023

Cela fait déjà quelques années et albums que l’on suit le Montréalais Krief, mais pour son album Skylines, il a décidé de reprendre son nom complet, Patrick Krief, pour ce qu’il appelle son «premier album solo». Le dossier de presse de l’album parle d’une vision d’un Canadien de première génération et d’un nouveau père qui raconte son histoire d’immigrant issu du Maroc. On comprend donc le côté très personnel de cette proposition.

Si les thèmes abordés dans Skylines sont plus personnels que jamais, la musique, elle, ne déroge pas de ce que nous livre l’artiste depuis des années, avec une musique indie-rock qui peut aller dans toutes les directions, parfois avec succès, parfois moins.

Le début de l’album, Let It Go, nous enveloppe avec un morceau plutôt doux, jouant avec un habile crescendo où les instruments prennent leur place chacun leur tour (à commencer par la guitare et un kick nous rappelant le battement d’un cœur) pour atteindre leur plein potentiel un peu avant 2min30. Le résultat n’est pas sans nous faire penser à du bon U2. Ensuite, Eloise nous propose une énergie pop et des arrangements légèrement planants. Malgré ses bons éléments, cette chanson n’a toutefois pas le mordant ce certaines de ses meilleures compositions.

On entend le côté plus expérimental de Patrick Krief avec Get Even. Il y a à la fois des parties très douces et d’autres très lourdes et chargées, mais c’est, contrairement au titre, pas très «régulier». On s’explique mal pourquoi, mais le tempo ne semble pas constant à travers la chanson et les instruments n’ont pas l’air de trop savoir où ils s’en vont. C’est particulièrement audible du côté de la batterie. C’est heureusement la seule chanson qui va dans cette direction. Dans Chiburi, on va plutôt du côté d’un boléro avec une voix grave à la Leonard Cohen dans la première moitié. On nous surprend toutefois dans la deuxième partie avec un rock épique qui vaut le détour. Cette intensité tranche particulièrement avec les suivantes, la ballade Damned et la première moitié de Alone qui revient par la suite à une formule plus rock qui lui réussit bien.

Mishima reprend la formule de varier les intensités, mais celle du début nous fait immanquablement penser à la chanson Sunshine Reggae, chanson que l’on ne prévoyait pas associer à Krief un jour! La portion rock est plus réussie, mais la fin de la chanson revient comme au début, alors impossible de faire abstraction de cette similitude, aussi vague soit-elle. Aussi relativement ensoleillée dans son ton, Say Goodnight ne nous offre toutefois pas de surprises au niveau des arrangements et peine quelque peu à se démarquer des autres. Au contraire, le rock de Hard Luck nous reste instantanément en tête, même si elle n’offre pas la même finesse que d’autres chansons de l’album, dont Ten Steps qui, après une intro d’une trentaine de secondes, nous transporte avec un rock plus nuancé avec des portions très chargées et d’autres plus légères, créant un effet plutôt réussi.

La fin de l’album est plutôt douce, avec la chanson-titre Skylines, présentée comme une berceuse, mais qui se transforme en petites montagnes russes, et Light Eyes, morceau acoustique guitare-voix. Dans les deux cas, on retrouve de bons éléments, mais rien qui se démarque véritablement du lot. C’est dommage comme on sent que l’on finit sur une note plus faible alors que l’album démarrait en lion avec Let It Go, même si on comprend l’idée de conclure l’album avec quelque chose de plus intime, vu les thèmes qui on été abordés.

Rappelons que cet album de Patrick Krief dure 47 minutes, ce qui est loin d’être une écoute légère. Cela lui avait souri à l’époque avec son album double Automanic, mais ce n’est pas un pari facile de proposer un album avec autant d’ambiances différentes et réussir à garder l’attention de son auditoire du début à la fin. Dans le cas de Skylines, l’opus aurait pu bénéficier de quelques chansons en moins pour éviter de trop s’éparpiller, mais alors, il n’aurait peut-être pas pu aborder certains sujets de la même façon. C’est toujours un dur équilibre et si l’album n’est pas à notre avis son meilleur, il se défend tout de même très bien et livre un côté que l’on espère découvrir davantage de Krief dans le futur.

Cet album peut être écouté sur la page Bandcamp de l’artiste.

À écouter : Let It Go, Damned, Ten Steps

7,4/10

Par Olivier Dénommée


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