Forêt pour deux pianos – Roman Zavada

Sorti le 3 mai 2024

Ça nous paraissait comme si c’était hier, mais le précédent album de Roman Zavada, Résonances boréales, est paru en 2016! Par la suite, le pianiste et compositeur a beaucoup présenté le spectacle associé à cette musique, mais ce n’est qu’en 2024, soit 8 ans plus tard, qu’il était prêt à lancer du nouveau matériel. Malgré son titre Forêt pour deux pianos, cet album n’hésite pas à ajouter d’autres instruments autres que le piano pour créer des ambiances dont Zavada a le secret.

Si le précédent opus de Roman Zavada a été inspiré par les aurores boréales dans le Grand Nord canadien, Forêt pour deux pianos est le fruit de 2 ans de travail sur 2 pianos qui ont pris racine dans la forêt autour de chez lui. «En suivant les saisons, les silences blancs de neige ou les craquements des écorces, il se révèle dans une toute nouvelle esthétique musicale», soutient avec poésie le communiqué annonçant sa sortie. En effet, il est mentionné que la forêt a directement eu des conséquences sur le son de ses instruments, selon la météo du moment. Le musicien nous invite donc à vivre la forêt à travers cette musique et les titres nous aident à imaginer le contexte de création de certaines des pièces.

Une fois que les intentions ont été énoncées clairement, attaquons-nous à l’exécution : on connaît Zavada pour sa musique atmosphérique et inspirée et c’est exactement ce qu’il nous livre ici. Son jeu de piano est toujours aussi efficace et la plupart de ses compositions sont à savourer les yeux fermés. Lueur ouvre l’album avec douceur. Outre le piano, on remarque très vite les sons ambiants et les craquements des instruments. À la première écoute, ça nous sautait un peu aux oreilles, mais très rapidement on apprivoise ce côté très organique, parfaitement imparfait. Au fil de la pièce s’ajoutent plusieurs instruments (incluant des cordes et des instruments à vent bien amenés), contribuant au côté cinématographique de la chose et aux émotions en général.

On a aussi Volée qui se permet d’ajouter quelques percussions, donnant une pièce légèrement plus rythmée, tout en restant étrangement, du moins pour une portion importante de la piste. Elle est suivie de Brise, mettant notamment en vedette les sons de la nature en arrière-plan, toujours présents sans être intrusifs, comme s’ils faisaient partie de la composition, lui donnant une certaine force; le musicien seul en harmonie avec la nature. Ce son s’arrête dans les premières secondes de Quiétude, plutôt intérieure dans son énergie.

Après plusieurs morceaux de 4 ou 5 minutes, Nuée y va d’une composition brève, mais plus dense, avec différents instruments qui prennent la place. La pièce est réussie dans la première moitié, mais elle tombe dans le registre atmosphérique et réussit à contenir des petites longueurs vers la fin. Mais on se reprend de bien belle façon avec Éclaircie, envoûtante du début à la fin. Quant à Tempête, son titre ne correspond pas tout à fait à l’ambiance de la pièce, elle qui demeure assez douce du début à la fin. Elle tranche toutefois avec la suivante, Embellie, qui reprend vie avec une bonne dose d’émotions.

Dans Éclipse (A-t-elle été écrite le 8 avril 2024? Ça serait drôlement rapide de la sortir moins d’un mois plus tard!), il ne s’y passe pas grand-chose, mais à l’image de l’événement, c’est la nature qui s’est mise en pause pendant quelques brefs instants seulement, où on contemple cet événement historique presque en silence. C’est donc un clin d’œil approprié qu’en fait Roman Zavada. Enfin, l’album se conclut avec justesse sur Crépuscule, morceau empreint d’émotions, particulièrement de la part du violon. Une fin parfaite pour un album inspiré!

Forêt pour deux pianos est du pur Roman Zavada, dans la mesure où il ne se contente pas de composer et de jouer de la belle musique : il nous plonge dans une expérience, un voyage auditif qu’il parvient à rendre visuel. Certaines compositions n’ont pas la même force, mais même les plus faibles servent à ajouter à l’effet d’une autre piste plus riche en émotions. On espère d’ailleurs avoir la chance d’assister à un spectacle avec cette nouvelle musique et on se souhaite de ne pas avoir à attendre encore 8 ans pour une prochaine sortie de ce musicien talentueux!

À écouter : Lueur, Éclaircie, Crépuscule

8,2/10

Par Olivier Dénommée


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