
Sorti le 16 août 2024
On l’aura attendu longtemps, mais le voilà enfin, le 2e album studio de Kroy, alias Camille Poliquin, la moitié plus sombre de Milk & Bone! Militia vient quelques mois après le EP Bloodmoon, dont la totalité des 4 chansons se retrouve ici, en plus de quelques chansons lancées en singles au fil des mois pour mousser cette sortie, si bien que sur 12 pistes, 7 étaient déjà connues.
Rappelons que le précédent album de Kroy est Scavenger, remontant à 2016. Depuis, elle ne fait que confirmer sa direction artistique, une pop électronique souvent tendue mettant en contradiction sa voix juvénile et des sonorités souvent lourdes. Et comme on l’a mentionné lors de notre critique de Bloodmoon, elle ne semble pas viser le grand public, préférant s’adresser à une niche plus restreinte, mais aussi plus ouverte à ses diverses expérimentations. Cela ne veut quand même pas dire qu’elle est incapable de produire des chansons accrocheuses, au contraire!
L’expérience débute avec la brève Killswitch, juste assez longue pour montrer les contradictions entre une musique douce, limite berçante, et des paroles explicites. Elle mène rapidement à Defender, beaucoup plus énergique et allant dans plusieurs directions. Aucune n’est mauvaise en soi, mais il se passe tellement de choses en 3 minutes qu’on se demande si ce n’est pas un peu trop? Et la fin vient tellement soudainement qu’on n’a pas le temps de répondre à notre question avant l’arrivée de Joligentil, morceau résumant bien l’énergie sombre de Kroy et tirée de son dernier EP. En fait, les 2 suivantes, Alaat et Airforce One, viennent aussi de Bloodmoon, et notre opinion d’elles ne change pas : le build-up d’Alaat la rend incontournable presque à lui seul alors que Airforce One frappe fort avec sa très longue montée et ses sonorités nous rappelant quelque peu Purity Ring.
Satin Satan est une toute nouvelle chanson et elle frappe par son côté étrangement sympathique, surtout au milieu d’un album comme celui-ci! Bluebird, bref morceau aux vocalises presque religieuses, nous mène doucement à Creature, morceau lent et lourd, mais pas sans quelques lignes vocales très aériennes (voire fantomatiques), donnant une toute autre allure à la chanson. Un peu plus minimaliste, The Wolf n’est pas plus légère, bien au contraire, et elle laisse simplement plus de place aux textes de la chanteuse. La légèreté vient toutefois avec Ghost (mais pas sans quelques glitches ici et là pour garder la tension vivante), ce qui se prend étrangement bien à ce stade de l’album. La chanson est toutefois excessivement courte, malheureusement!
Saltwater revient à une électro-pop plus «conventionnelle», avec tout l’accent mis sur la force des refrains. Kroy ne peut quand même pas s’empêcher d’incorporer un passage plus corsé dans le dernier tiers de la piste, mais c’est une simple formalité pour se souvenir de qui il s’agit! L’album se conclut sur Twelve Wheeler Truck, débutant avec de magnifiques lignes de piano et une mélodie assez douce de la part de la chanteuse. Mais, la connaissant, on savait qu’elle ne pouvait pas garder cette énergie jusqu’au bout et, après 1min30, on a droit à quelque chose de plus lourd et percussif, mais pas moins enlevant. La chanson ne dure que 2 minutes et demie, mais on en aurait bien pris un peu plus!
L’album Militia aura pris presque 8 ans, mais on est heureux d’avoir enfin pu l’écouter. Il nous ramène avec nostalgie à Scavenger, que l’on avait apprécié tout en restant critique de certains choix, mais qu’on avait appris à véritablement apprécier au point de se hisser parmi les meilleurs albums de 2016 à notre avis. On n’a évidemment pas le recul pour deviner ce qu’il en sera pour celui-ci, mais tous les ingrédients semblent rassemblés, même si le résultat est un tout petit peu plus lourd que dans son précédent album – mais le monde est aussi un peu plus sombre qu’il l’était il y a 8 ans, alors ça se comprend. Ce n’est probablement pas un album très estival, mais Militia contient quelques solides compositions qui valent le détour.
L’album est notamment disponible sur la page Bandcamp de Kroy. Notez que la critique a été faite à partir de l’ordre des chansons sur Spotify, mais que celui-ci est légèrement différent sur Bandcamp, pour une raison qu’on ignore!
À écouter : Airforce One, Satin Satan, Saltwater
7,8/10
Par Olivier Dénommée
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