
Sorti le 21 mai 2021
Comme on a beaucoup apprécié son EP Avant qu’on se déteste, paru en 2023, on a voulu revenir dans la discographie passée de Noé Talbot (Benjamin Piette de son vrai nom) pour en entendre davantage de son folk-rock aux paroles drôlement songées. Cela nous ramène à son 3e album, Remercier les accidents, publié en 2021, décrit avec justesse comme son album le plus mature et abouti.
Le musiciens est un touche-à-tout notamment associé au punk, mais sous le nom Noé Talbot, il offre des chansons plus acoustiques où les textes prennent tout leur sens. L’album ouvre avec la chanson-titre Remercier les accidents, contenant une bonne dose d’optimisme dans les paroles et la musique malgré les embûches décrites. Le ton y est plutôt juste et ça commence assez bien notre écoute! On va encore plus vers l’énergie avec Déjà ça, chanson d’un amour florissant entre 2 personnes. Mais, musicalement, c’est à notre avis un peu plus chargé que nécessaire dans la seconde moitié de la chanson. Coup de soleil est la première chanson plus acoustique de l’album, avec quelques mélodies très berçantes au début, puis des passages plus épiques dans la deuxième moitié. Le côté conteur de la chanson nous fait ici penser à du Alexandre Poulin, qui utilise fréquemment cette approche dans ses compositions; on y reviendra.
Malgré ses bonnes idées, Le cœur est sans appel peine à nous marquer. Par contre, Rossy reste vite en tête… mais c’est probablement parce que son hook ressemble à un mélange entre Africa de Toto (ou bien Ring of Fire popularisée par Johnny Cash) et Ti-cul des Cowboys Fringants, avec des couplets reprenant presque parfaitement l’énergie des chansons d’Alexandre Poulin, constat qu’on fait décidément plusieurs fois au fil de l’écoute. C’est à la fois très efficace et très «facile» d’opter pour cette approche, alors on garde des sentiments mitigés même si on peut difficilement se retenir de taper du pied en l’écoutant. La suivante, Nomade, y va d’un morceau beaucoup plus dépouillé… du moins au début, puisqu’il y a un imposant chœur qui s’ajoute peu après 1 minute! Cela lui donne un côté solennel très réussi, bien que les applaudissements à la fin demeurent de trop à notre avis.
Notre chanson préférée de cet album est possiblement La vie change : son folk-rock entraînant (entre autres grâce aux lignes de trompette) et ses paroles avec une petite dose de mélancolie touchent parfaitement leur cible. On n’est pas tout à fait surpris d’apprendre qu’Antoine Lachance est associé à la coréalisation de la chanson! Bien meilleure personne que moi se démarque pour sa part pour la justesse de ses paroles. «Les gens comme toi auront jamais la gloire / Au fond, c’est peut-être dans l’ombre que se cache l’espoir / Ce sont ceux qui trébuchent le plus / Qui devraient nous apprendre à marcher / Ce sont ceux qui hésitent qu’on devrait écouter», chante Noé Talbot. Le déjeuner de l’hôtel qui suit a toutefois le gros défaut de sonner de façon très similaire à Bien meilleure personne que moi, si bien qu’on a parfois l’impression qu’il s’agit de la deuxième partie de la même chanson.
Pour l’instant y va d’une douce chanson et émotive plutôt réussie, si ce n’est qu’elle est un peu courte. La suivante, Rivière Noire, mise sur un build-up très bien amené. Le seul commentaire qu’on trouverait à lui faire est le choix du mot «poqué», qu’il utilise à quelques reprises, mais qui fait tache à travers le reste de ses textes souvent plus poétiques. Cela reste bien sûr minime! Cette chanson aurait été une parfaite conclusion à l’album, mais c’est plutôt Je me berce d’illusions qui a le dernier mot avec un morceau un peu lourd et mystérieux. La chanson n’est pas mauvaise, mais on n’aurait pas fini avec une telle énergie, c’est tout!
Mine de rien, l’album Remercier les accidents dure tout près de 45 minutes. C’est donc une œuvre très chargée que nous a livré Noé Talbot avec plusieurs bons coups, en plus des chansons enregistrées durant les mêmes séances qui se sont plus tard retrouvées dans le EP Avant qu’on se déteste. Règle générale, l’album est aussi fort dans la qualité de ses textes, de ses mélodies et de ses arrangements. Il faut dire que l’artiste a été bien entouré dans le processus, ce qui ne peut qu’aider un peu! Dans tous les cas, il nous confirme qu’il est à suivre de très près dans l’avenir.
Version deluxe
«45 minutes pour un album de Noé Talbot, ça passe trop vite», ont sûrement dû se dire certains fans plus intenses. À ceux-ci, l’artiste propose une version deluxe de son album, ajoutant 3 pistes de plus pour un total de 15 chansons en 55 minutes! Les chansons de plus poursuivent dans la même lignée que les autres.
Y’a pas de liberté dans la fuite est probablement la plus inspirée du lot, offrant des textes pleins de vérité. «Peu importe les excuses que tu t’trouveras / Y’a pas de liberté dans la fuite / Peu importe les prétextes que tu t’inventeras / Ta seule prison c’est tes choix». Il y a bien certaines petites faiblesses dans l’interprétation, mais la chanson demeure drôlement efficace. Point bonus, elle réussit même au passage à mentionner (à nouveau) le nom de l’album! Des milles et des mots y va d’une sympathique chanson aux airs country que l’on ne retient toutefois pas outre mesure, et Essaie pas de me réparer brille le plus dans les segments plus feutrés où les voix (celle de Talbot mais aussi une voix féminine) répètent «Et puis, moi, j’essaierai pas de te réparer».
Pour avoir beaucoup écouté la version deluxe de l’album, on peut dire que ces pistes s’incorporent assez naturellement au reste de l’opus et ajoutent à leur façon au propos de Noé Talbot. Le principal défaut, c’est que ça rend le tout encore plus long, alors il vaut mieux être prêt mentalement avant d’y plonger!
Cet album est notamment disponible sur la page Bandcamp de Noé Talbot.
À écouter : Remercier les accidents, La vie change, Rivière Noire // Version deluxe : Y’a pas de liberté dans la fuite
7,8/10
Par Olivier Dénommée
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