
Sorti le 31 janvier 2025
Ceux qui nous suivent depuis un certain temps ont peut-être compris à quel point on aime suivre la musique du compositeur italien Ludovico Einaudi. Ça n’a donc pas été très compliqué de nous convaincre d’écouter sa dernière proposition, The Summer Portraits, malgré l’ironie de voir un tel album sortir en janvier.
Selon ce qu’il a été possible de lire au sujet de cet album, l’inspiration vient de vacances estivales sur le bord de la Méditerranée, où Einaudi serait tombé sur une série de toiles réalisées au fil des étés précédents par l’occupant précédent, l’amenant à lui-même réfléchir à ses propres étés passés. Donc, malgré le thème de l’été, c’est surtout le côté introspectif, les souvenirs et la nostalgie que l’on retient de la proposition.
Einaudi est généralement à son meilleur lorsqu’il est accompagné d’autres musiciens et on est rassuré dès les premiers instants de Rose Bay que les violons font une fois de plus partie de son arsenal. La pièce reste toutefois atmosphérique du début à la fin, sans qu’il se passe véritablement quelque chose. Si on considère cette piste comme une intro, le compositeur a été jusqu’à en faire un single, un choix pour le moins surprenant, surtout qu’on trouve que c’est possiblement la moins intéressante de tout l’opus! C’est d’autant plus surprenant que la suivante, est infiniment plus touchante : Punta Bianca nous frappe par la simplicité de la mélodie, qui est forcement amplifiée par l’enrobage qui lui donne un côté très chargé lorsque la montée en est à son apogée. Le seul défaut qu’on arrive à lui trouver, c’est sa fin qui s’étire un peu plus que nécessaire : elle aurait simplement pu se terminer une minute plus tôt sans problème, même si on s’entend que la portion finale n’est pas mauvaise en soi.
On retrouve le Einaudi qu’on connaît bien avec Sequence, où le piano est bien mis de l’avant, simplement appuyé par les cordes. Mais la pièce s’étire quelque peu, elle qui dure plus de 6 minutes, et elle doit changer d’énergie à quelques reprises pour garder notre attention. Déjà, les différents segments ne sont pas tous de force égale, mais la fin nous semble par ailleurs le bout le moins réussi. Il aurait été mieux d’opter pour quelque chose de plus bref, mais de mieux punché, pense-t-on. La suivante, Pathos, est encore plus longue, 7 minutes, mais opte pour la lenteur, particulièrement au début. Tout devient plus rythmé à partir de 1min38, avec même des percussions en arrière-plan. La montée (par ailleurs très réussie) n’est pas sans nous rappeler une autre pièce phare de Ludovico Einaudi : Experience, tirée de son excellent album In a Time Lapse. Dur de pointer l’ensemble des similitudes entre les 2 compositions, mais écoutez-les une après l’autre et vous comprendrez peut-être de quoi on parle! Sinon, comme ça semble être le mot d’ordre dans cet album, la pièce est prolongée artificiellement d’une minute de plus pour quelques notes de piano doux, nous rappelant comment elle avait commencé, même si ça aurait frappé beaucoup plus fort de conclure avec un «bang» épique. Comme Einaudi semble abonné aux fins de pièces prolongées, inutile de mentionner que cela arrive ici aussi.
Poursuivons avec To Be Sun, morceau berçant très réussi, mais aussi très familier dans ses mélodies, bien qu’on n’ait pas retrouvé à quelle composition précédente de Einaudi elle nous faisait penser exactement! La suivante, Jay, a aussi quelque chose de très familier, possiblement grâce à quelques notes au début qui nous font très vaguement penser au Tifa’s Theme de Final Fantasy VII, mais on s’en va rapidement complètement ailleurs. Notons l’enregistrement intimiste, avec seulement le piano (et ses craquement bien audibles). Surtout, la pièce a l’avantage d’aller à l’essentiel, se concluant juste au bon moment (et c’est, incidemment, la piste la plus courte de tout l’opus).
In Limine explore quelques énergies différentes, commençant par un piano minimaliste laissant place aux émotions. Après une coupure peu après le milieu où on peut entendre le chant des oiseaux, on a ensuite droit à quelque chose de plus chargé, mais aussi un peu moins efficace. Il aurait possiblement été une bonne idée d’en faire 2 pistes distinctes. Et malgré son titre, Summer Song est un morceau parfaitement intemporel, qu’on se plaît à apprécier même en regardant la neige dehors grâce à la grande beauté de la composition.
C’est là qu’on commence à sentir la fatigue de l’album qui dure, mine de rien, plus d’une heure. Oil on Wood s’écoute bien sans être exceptionnelle, Episode One propose un build-up musical intéressant, mais pas aussi émotif que les meilleures pièces entendues précédemment. S’ensuit Maria Callas, du nom de la célèbre cantatrice, livrant une musique très inspirée, montrant que Einaudi n’avait pas encore tout à fait dit son dernier mot! Cela aurait par ailleurs été le bon mot de la fin, mais c’est plutôt à Santiago que revient cet honneur. Celle-ci est un morceau lent et émotif devenant graduellement plus chargé sans sacrifier la charge émotive. Tout ce qu’on a à redire, c’est qu’il aurait pu conclure une trentaine de secondes plus tôt.
Arrivant 3 ans après Underwater, The Summer Portraits fait du bien à l’âme. Malgré ses choix artistiques qui ont quelque peu prolongé artificiellement la durée de l’album, il s’écoute excessivement bien et devrait aisément s’incorporer dans la liste des bons albums de Ludovico Einaudi, surtout avec ses meilleures pièces qui valent franchement le détour, quoi qu’on a trouvé à en dire. Mais on ne peut s’empêcher de s’imaginer à quel point l’album aurait été puissant s’il avait été élagué un peu, en ne gardant que 10 ou 11 pièces sur 13 et en évitant les longueurs les plus évidentes!
À écouter : Punta Bianca, In Memory of a Dream, Maria Callas
8,2/10
Par Olivier Dénommée
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