
Sorti le 22 août 2025
Tel qu’annoncé ces dernières semaines, l’harmoniciste Guy Bélanger a souligné 50 ans de carrière avec la sortie de son 10e album studio, Postcards from London, enregistré cet hiver aux légendaires Abbey Road Studios de Londres. Le bluesman s’est donc pas mal gâté avec un album d’environ 48 minutes survolant les différents styles de prédilection de l’artiste et de ses amis musiciens.
Même quand on a une carrière riche comme celle de Guy Bélanger, qui semble avoir joué avec à peu près tout le monde au fil des décennies, pouvoir enregistrer à Abbey Road – reconnu pour avoir notamment été le studio des Beatles – est un honneur qu’il ne pensait jamais un jour avoir. On n’y était pas pendant les 4 journées d’enregistrement, mais on peut deviner qu’il en a pleinement profité. Cela se sent aussi dans le son des pièces enregistrées : on y entend le plaisir dans les chansons plus énergiques et l’émotion dans les plus douces. Et celles-ci proposent un équilibre intéressant entre des reprises incontournables et du nouveau matériel.
L’album ouvre sur le funk Uptown Up de Maceo Parker, un petit bonbon pour les musiciens de Bélanger, qui se fait lui-même relativement discret… jusqu’à ce qu’il se laisse véritablement aller dans un solo d’harmo endiablé! Cette première piste met tout de même assez bien la table : oui, cet album célèbre la carrière de l’harmoniciste, mais ça ne se fait pas sans aussi laisser la place à ses amis. C’est d’autant plus vrai dans la suivante, Think It Over, composée et chantée avec brio par son bassiste Alec McElcheran.
Avec l’instrumentale London Fog, on a droit à un morceau très senti de la part de Guy Bélanger pendant que ses musiciens se font plus discrets à l’arrière. Elle est suivie d’une version instrumentale d’une chanson intemporelle : The Long and Winding Road! Il s’agit du clin d’œil assumé de Bélanger pour les Beatles, et les musiciens ont été extrêmement respectueux de la chanson en gardant intacte son intention et son énergie. La principale différence aura donc été de remplacer la voix de Paul McCartney par l’harmonica émotif de Bélanger. Si on avait à choisir entre les 2 versions, on pencherait probablement quand même pour l’originale, mais à notre avis cette reprise se défend franchement bien.
Avec le blues I Need a Change, Guy Bélanger se permet un petit message social, faisant un parallèle entre les relations tendues et les conflits un peu partout le monde, sujet incroyablement d’actualité. C’est aussi la première fois de l’album qu’on entend sa voix. On l’entend encore chanter dans White Freightliner Blues (de Townes Van Zandt), morceau plus hyperactif dont l’interprétation devrait faire sourire… et impressionner en spectacle si les musiciens peuvent maintenir le tempo! S’ensuit The Island, compo de Bélanger inspirée de la jungle thaïlandaise (mais qui peut nous amener à fermer les yeux et s’imaginer à l’endroit exotique de notre choix!), nous rappelant en même temps le côté cinématographique de sa carrière musicale.
Crossroads est particulière dans l’album : c’est non seulement la plus longue de tout l’opus, avec plus de 7 minutes, mais elle laisse aussi la place à un autre chanteur, Rob Lutes, invité spécifiquement pour cette chanson qui faisait déjà partie du répertoire de Bélanger par le passé. Cela donne un dialogue puissant entre la voix de Lutes et l’harmonica de Bélanger sur cette reprise du répertoire de Calvin Russell grandement bonifiée au niveau des arrangements. Même si la version est un peu longue, elle vaut le détour!
Don’t Go Far de Curtis Stigers est reprise en version instrumentale, laissant place à certaines des plus belles lignes d’harmo de l’album. Elle nous mène à la finale, The End of the Beginning, une composition des membres de Will Driving West. En tant que fan du groupe, on doit admettre que cette collaboration n’était pas sur notre carte de Bingo cette année, mais il est intéressant de voir ce que Guy Bélanger et ses musiciens ont pu en faire. La fin épique est aussi un parfait point final à Postcards from London.
Nos attentes étaient élevées pour ce 10e album de Guy Bélanger, et on doit dire qu’on n’a pas été déçu. Il y a quelque chose de magique et d’intemporel quand on écoute un bon blues et le musicien a su garder cette magie bien vivante tout au long de cet album. Il est aussi parvenu à faire un survol de sa carrière de façon éclectique sans jamais que le résultat sonne décousu. Amateurs de blues, faites-vous plaisir et savourez Postcards from London sans modération!
À écouter : Think It Over, The Island, Don’t Go Far
8,3/10
Par Olivier Dénommée
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