Piano Renaissance : Appassionato – Gregory Charles

Sorti le 24 novembre 2023

Quand on pense à Gregory Charles, on pense à bien des talents, dont celui de crooner et d’interprète hors pair, si bien qu’on en oublie facilement qu’il se défend tout aussi bien en composant de la musique instrumentale, même si on sait que c’est un pianiste hyper talentueux. C’est pourtant exactement ce qu’il livre avec Piano Renaissance : Appassionato, un album entièrement instrumental où il compose 15 pistes, toutes inspirées par un personnage ou un élément-phare de la Renaissance. Malgré le titre de l’album, on n’entend pas que du piano, puisque Gregory Charles s’entoure de violonistes, altistes et violoncellistes pour enrober ses nouvelles compositions.

Notons au passage que les titres ne laissent pas trop place à l’interprétation, puisqu’ils sont tous accompagnés du nom de l’inspiration derrière les différentes compositions. Ceci étant dit, ce n’est pas trop d’information dans la mesure où on ne sait pas comment est supposé «sonner» chacun des personnages associés. On peut donc utiliser ces noms comme repère et essayer de visualiser leur vie à travers la musique du pianiste.

Dès les premiers instants de L’ombre du divin : Michelangelo, on sait qu’on aura affaire à de la musique somptueuse, à la hauteur de ceux que le pianiste a voulu représenter. Dans ce cas-ci, on mêle habilement des portions très douces et d’autres très intenses, montrant peut-être l’étendue de la palette de Michel-Ange ou pour faire un contraste entre la petitesse de l’Homme et la grandeur de Dieu que l’artiste a souvent représenté dans ses œuvres qui ont traversé le temps; les deux options nous semblent autant plausibles!

C’est d’ailleurs une formule que l’on entend dans plusieurs autres des pièces de l’album, comme la dansante La mélodie du barde : Leonardo, la presque berçante La licorne : Raffaello, la surprenante Le barde de Stratford : Shakespeare ou encore la très inspirée (quoiqu’un peu longue, à plus de 8 minutes) Sonate pour un temps de découverte : Fuoco. La rêveuse Le poète : Pétrarque, Les joues de la Joconde : Mona, toute en retenue, et Le penseur amoureux : Abélard demeurent quant à elles davantage dans le registre doux (malgré quelques petites envolées ici et là), mais tirent aussi bien son épingle du jeu.

Notons au passage certains morceaux qui sortent du lot pour diverses raisons. Le marionnettiste : Machiavelli devient particulièrement chargée et tourmentée, peut-être de par le thème de la pièce. Ce n’est pas une mauvaise pièce, au contraire, mais elle n’a certainement pas le même effet que les autres! L’homme dans la lune : Galileo est aussi beaucoup plus intense que le reste de l’album, et ce, dès le début. Et à l’image de son titre, La victoire de François Ier : Marignano a quelque chose de victorieux, un peu pompeux dans son ton. Commentaire similaire pour la puissante La face cachée du soleil : Kopernic. Même L’éducateur : Gutenberg surprend par son intensité dramatique. L’album se termine sur une pièce planante au piano solo qui arrive à point, Un moment : Giotto. Pas besoin de cordes pour conclure le tout avec brio.

Le principal défaut qu’on pourrait trouver à Piano Renaissance : Appassionato est qu’il arrive dans une année déjà surchargée par de la musique au piano, dont plusieurs albums particulièrement réussis. Mais on ne peut pas taxer Gregory Charles de jouer dans la facilité, il propose des compositions inspirées avec quelques arrangements plus corsés qui ne s’adresseront pas à tous, mais qui plairont à ceux qui ont déjà entendu de la vraie musique classique avant.

Version courte

Au moment d’écrire ces lignes, la seule version de l’album Piano Renaissance : Appassionato proposée sur les plateformes numériques est la «version courte», ne contenant que 8 titres, soit la moitié de l’album complet (en fait, seulement 30 minutes sur 67 minutes!). C’est une façon de faire à laquelle nous ne sommes pas habitué, mais qui a le mérite de donner un bon avant-goût au public et l’amener à se procurer le «vrai» album s’il aime ce qu’il entend.

À écouter : La mélodie du barde : Leonardo, La face cachée du soleil : Kopernic, Un moment : Giotto

7,7/10

Par Olivier Dénommée