Humains – Babylones

Sorti le 24 novembre 2023

Jusqu’à présent, chaque fois qu’on a parlé du duo Babylones (Charles Blondeau et Benoît Philie), on apprivoisait un peu plus son style qui ratisse large et qui n’est pas nécessairement à la portée de toutes les oreilles. On avait même plutôt apprécié le EP Le tournesol géant en 2020. De retour en 2023 avec un album 40 minutes simplement intitulé Humains, Babylones nous surprend avec les directions musicales qu’il prend et les thèmes abordés dans ses paroles.

La chanson Abeille ouvre l’album avec un rock psychédélique entraînant et très réussi. Tout va bien jusqu’à ce qu’on s’attarde de plus près aux paroles, qu’il ne faut pas simplement prendre au premier degré. Même si le duo a été assisté par Stéphanie Boulay (des sœurs Boulay) dans l’écriture des paroles, il reste quelque chose de cryptique dans les textes. Ici, on arrive à sentir l’angoisse dans les paroles du chanteur qui se compare parfois à une abeille, mais c’est moins évident dans certaines autres chansons. Cannibale surprend quant à elle par son traitement plus roots, apparemment inspiré par de la musique péruvienne, avec une jolie mélodie chantée par une chorale. Ah, et le titre ne correspond pas du tout à la chanson, même si le mot y est prononcé quelque part!

Jusqu’à présent, la musique était assez solide pour supplanter nos questionnements quant aux textes de Babylones, mais les voix prennent trop de place dans L’amour c’est trop cruel pour qu’on ignore ce qui est chanté, particulièrement aux refrains. Ce n’est pas mauvais, mais on ne fait pas dans la subtilité ici! Plus lente et introspective et surtout moins chargée, Un singe dans l’espace fait du bien à entendre avec un côté psychédélique bien dosé. Mais que dire de Tout le monde va rire de moi, qui raconte une histoire d’enlèvement par des extra-terrestres? On vous laisse faire votre propre opinion, mais pour notre part, à part le côté comique de l’anecdote, la chanson ne nous marque pas outre mesure et on passe à la suivante.

Après quelques chansons plus douces, on revient à quelque chose de plus robuste avec Memento. D’ailleurs, on peine à bien entendre ce qui est chanté, même plusieurs écoutes plus tard. Mieux vaut se concentrer sur la musique, corsée mais plutôt réussie. Quant à En attendant le remonte-pente, il s’agit de la première composition de ce nouvel album, qui a donné le ton pour la suite. On mélange différentes énergiques, un côté un peu berceuse dans la mélodie et des paroles rassurantes, qui se mêlent toutefois rapidement à une musique bien plus corsée. Drôle de mix, mais on ne peut s’empêcher d’imaginer une version acoustique de la chanson qui aurait donné une toute autre énergie à la chanson.

Un jour, je vais le faire a quelque chose de terriblement familier dans son refrain : la mélodie et l’énergie rappelant celle de the Gaslight Anthem. Changez les voix un peu et on n’y voit que du feu! Les couplets sont en revanche beaucoup moins forts au niveau des mélodies; dommage parce que le refrain est probablement notre préféré de tout l’album! Les gars de Babylones ne sont pas des chanteurs à voix, mais plutôt à textes et on s’en rappelle à plusieurs moments, dont ici. La planante Les moineaux de l’Amérique du Nord est au contraire plus égale en qualité entre les différentes sections de la chanson et offre aussi un résultat plus agréable.

Lune rose (moi aussi, je t’aime) est un peu trop chargée à notre goût pour retenir quelque chose à ce stade de l’album alors que C’est ma tombe au milieu du béton offre une chanson énergique avec une bonne dose de name dropping de lieux. Notons tout de même que c’est la première fois qu’on entend personnellement quelqu’un parler de la rue Atateken (qui était encore Amherst jusqu’en 2019) dans une toune! Le dernier mot de l’album revient à Philippe ne veut plus jouer de musique. Une référence à un certain Philippe Paquin avec qui les gars jouaient dans le temps et qui est parti… en 2012. On ne peut pas dire que les gars de Babylones ne vont pas au bout de leurs idées, même si ça leur aura pris 11 ans! Ça reste spécial de consacrer une chanson à un sujet aussi précis, mais le rendu est quand même sympathique.

Notons que de longues sessions d’écoute ont été nécessaires afin d’écrire cette critique. L’album est tellement dense qu’on peine à résumer notre expérience et notre ressenti. On a l’impression que Babylones continue de ne pas vouloir entrer dans un moule, même si on commence à cerner certaines tendances sur le plan musical. C’est surtout au niveau des paroles que l’on nous surprend chaque fois. Si vous ne pouvez pas apprécier une toune si vous ne comprenez pas vraiment de quoi il est question, vous aurez peut-être de la difficulté avec Humains, mais si vous avez envie de vous défouler sans trop vous poser de questions avec un album de rock alternatif, vous y trouverez possibement votre compte sur plusieurs chansons.

L’album Humains est notamment disponible sur la page Bandcamp du groupe.

À écouter : Abeille, Cannibale, Les moineaux de l’Amérique du Nord

7,4/10

Par Olivier Dénommée


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