
Sorti le 14 mars 2025
Le Phoenix Orchestra, basé au Canada, est un ensemble classique dédié à la fois à la promotion de la musique occidentale et chinoise. Symbole de son mélange culturel, l’orchestre a été fondé par la violoniste Angel Wang, elle-même Canadienne originaire de Chine, et le dernier album, Phoenix Rising, met de l’avant le chef d’orchestre et arrangeur Claudio Vena, d’origine italienne mais aussi installé au Canada, en plus de contenir un enregistrement de la composition Phoenix Rising de la compositrice Alice Ping Yee Ho – vous l’aurez deviné, elle vient de Hong Kong, mais est également installée ici! On a donc droit à un métissage très assumé entre l’héritage asiatique (et d’ailleurs) et le talent qu’on retrouve ici-même, au Canada.
En plus d’être fondatrice et directrice artistique du Phoenix Orchestra, Angel Wang est aussi la tête d’affiche de l’album Phoenix Rising. Mais la vraie vedette, il faut le dire, est la musique : un heureux mélange de mélodies nous amenant instantanément en Chine, mais avec une instrumentation typiquement occidentale qui fera que les habitués de la musique classique ne perdront pas trop leurs repères.
L’opus ouvre sur Butterfly Lovers Concerto, une œuvre de près d’une trentaine de minutes en 7 mouvements composée en 1959. Considérée comme un chef-d’œuvre chinois de l’ère moderne avec une composition reprenant à la fois les codes de la musique chinoise et occidentale, l’œuvre fait bon usage de la gamme pentatonique, qui contribue grandement au son que l’on associe à la Chine. Les passages plus émotifs du concerto sont particulièrement réussis, et on apprécie spécialement les mouvements 1. Andante cantabile, 3. Adagio assai doloroso, ou encore 7. Adagio cantabile. Notons tout de même que les passages plus intenses sont aussi réussis, mettant bien de l’avant la virtuosité des musiciens du Phoenix Orchestra! Pensons seulement à l’épique mouvement 6. Presto resoluto!
Les pièces suivantes sont plus simples à suivre, elles qui ne comportent pas plusieurs mouvements. Song of Four Seasons est une chanson folklorique chinoise qui a traversé les époques. Bien que cette version ne contient pas de paroles, elle reflète bien l’hybride entre la culture chinoise et ses arrangements aux fortes influences occidentales. S’ensuit Dance of the Yao People, une composition de 1952, qui a la particularité de peut-être paraître familière pour certains grâce à sa mélodie qui s’apparente à When You Believe (enregistrée beaucoup plus tard par Whitney Houston et Mariah Carey).
Mayila est une autre chanson traditionnelle chinoise, mais elle aurait aurait aisément pu passer pour un énergique segment instrumental d’un opéra. Quant à la traditionnelle Galloping Horses, elle sonne exactement comme on peut se l’imaginer avec une interprétation énergique et, oui, galopante! Dernière pièce tirée du répertoire traditionnel chinois, Jasmine Flower porte aussi bien son nom, laissant place à un magnifique moment de grâce. Celle-ci aurait même inspiré un air d’un opéra de Puccini, signe de sa beauté mélodique intemporelle.
Le clou de l’album est la pièce-titre, la composition Phoenix Rising d’Alice Ping Yee Ho. Si elle ne comporte qu’un mouvement, celui-ci demeure substantiel : plus de 11 minutes! Écrite comme un poème symphonique, la pièce a été créée sur mesure pour Angel Wang et son orchestre, et ça s’entend. Le côté théâtral de la pièce et l’instrumentation riche font en sorte que la pièce pourrait aisément se retrouver dans n’importe quel programme de musique contemporaine sans qu’on trouve qu’elle n’est pas à sa place. L’héritage chinois y est plus discret (on comprend qu’il aurait été trop facile de simplement faire une pièce dans une gamme pentatonique!), mais on entend bien certains motifs nous rappelant les origines de la compositrice. Ces idées sont seulement très secondaires derrière celle du phénix, animal de légende qui renaît constamment de ses cendres. Les passages explorant différentes énergies véhiculent plutôt bien ce concept et si on devait dire quelque chose sur la composition, ce serait possiblement qu’elle se termine de façon un peu brusque!
L’album Phoenix Rising du Phoenix Orchestra offre vraiment un mélange équilibré entre le matériel de base issu de la Chine et une interprétation toute canadienne. Si l’album s’écoute bien en tout temps, autant pour les amateurs de classique contemporain que de musique asiatique, on ne peut que penser qu’il sort pile au bon moment dans un climat géopolitique particulier faisant en sorte que le sentiment d’appartenance au Canada est plus fort que jamais. Écouter aujourd’hui cet album mettant de l’avant le talent de musiciens issus d’un peu partout à travers le monde mais qui ont tous choisi le Canada comme terre d’accueil? Il y a certainement de quoi être fier.
À écouter : Butterfly Lovers Concerto : 7. Adagio cantabile, Jasmine Flower, Phoenix Rising
7,9/10
Par Olivier Dénommée
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