CHRONIQUE : Bilan personnel du FIJM

Montreal-International-Jazz-logoPar Olivier Dénommée

Bien rares sont les personnes qui pourront se vanter avec raison d’avoir tout vu au Festival international de jazz. La programmation est tellement riche et surtout tellement de choses se passent en même temps qu’on va nécessairement manquer quelques grands moments de musique.

Une fois que cela a été pris en compte, chacun peut se faire son propre bilan de son expérience jazz, entre les 26 juin et 6 juillet derniers. Certains seront certainement satisfaits de leurs découvertes dans les shows gratuits, d’autres déçus de leurs stars favorites (on pense à la piètre performance de B.B. King et Aretha Franklin). Bref, voici ce que je retiens de ce 35e FIJM.

Overdose

C’est un peu une loi non écrite de chaque 5 ans, les événements doivent en faire un peu plus pour épater la galerie et montrer leur vitalité. Le Festival de jazz en était donc à ses 35 ans, et est bien installé depuis belle lurette. Cela a donné une très belle programmation cette année, parfois même «trop» belle. Je m’explique. Lorsque j’ai regardé seulement la programmation payante pour savoir quels shows je désirais voir, je me suis retrouvé confronté à plusieurs énormes dilemmes : le même soir, en même temps, parfois 3 ou même 4 artistes que je voulais absolument voir. Heureusement, ça a été plus facile certains autres soirs. Les têtes d’affiche, trop nombreuses à certains moments auront causé bien des maux de crâne aux amateurs qui ne veulent rien manquer. Et dommage que personne ne semblait vouloir jouer le 6 juillet.

Classique

Je n’ai pas en tête les programmations des années précédentes, mais il me semble que cette année, le classique a été beaucoup à l’honneur, particulièrement au début et à la fin du festival. Ouvrir avec Alain Lefèvre et l’OSM a certainement contribué à cette impression. Cela m’a rappelé aussi qu’Oliver Jones, qui avait le spectacle payant de clôture le 5 juillet, était lui aussi de formation classique. Il avait d’ailleurs reçu le jeune Daniel Clarke Bouchard, pianiste classique avec qui il a joué une des pièces de son album. Comme quoi c’est tout à fait possible de jumeler ces deux genres complètement différents.

Oliver Jones Daniel CB

Vedettes locales

Chaque année, un lot d’artistes montréalais (ou qui sont des habitués de la scène montréalaise) ont l’occasion de monter sur scène au festival, souvent lors d’un show gratuit, pour faire découvrir leurs talents à un très vaste public. Les Suzie Arioli, Coral Egan, Emilie-Claire Barlow et Random Recipe (pour ne nommer que ceux-ci) auraient cependant très bien pu briguer un show en salle, comme Jordan Officer, Dear Criminals, Rafael Zaldivar et Jérôme Beaulieu Trio ont fait. Dans tous les cas, il y a eu de très belles performances et de nombreux cœurs ravis par les shows d’artistes d’ici. Sinon, ne passons pas sous silence la performance de Diana Krall, qui fait un tabac sur la grande scène extérieure. Il en faut encore, quelques gros noms qui ne font pas juste des shows à 100$ et plus le billet.

Crédit photo : Brian Payne
Diana Krall / Crédit : Brian Payne

Mes découvertes

Sur un plan plus personnel, je retiens les découvertes que j’ai pu faire durant ce 35e FIJM. Le show de For the Record : Tarantino était tout simplement fou, un spectacle de haut calibre qui a été présenté à Broadway, pour vous donner une petite idée. Ça m’a donné envie de passer la filmographie complète de Quentin Tarantino en sortant de là. Autre découverte, Jérôme Beaulieu Trio, dont j’avais entendu beaucoup de bien. Le style était en plein dans mes cordes, étant un grand fan de jazz scandinave, un peu à cheval entre le jazz et le rock. Le JBT a tous les éléments pour me charmer, et en prime un nom facile à retenir (contrairement à Esbjörn Svensson ou Tord Gustavsen). Chapeau à lui et son équipe tissée serrée, je vais assurément suivre ce jeune talent dans ses futurs projets. Autre découverte, l’étendue du talent qu’on peut retrouver à la Ligue d’improvisation musicale de Montréal (LIMM). Je la connaissais de nom, mais jamais je n’ai eu l’occasion d’assister à un match. Après avoir vu une finale provinciale, l’envie de me chercher des billets de saison pour cet automne m’a immédiatement pris. Tellement de belles choses et un peu d’audace par-ci par-là, c’était beau à voir (et à entendre bien sûr). Dans un registre plus rock’n’roll, j’ai fait connaissance avec Les Deuxluxes, un sympathique couple qui sonne comme 4 musiciens et qui déplacent de l’air. Beaucoup d’air. Le band existe depuis un an et demi seulement, mais il a le vent dans les voiles.

Les Deuxluxes
Les Deuxluxes

Là, difficile de parler d’une découverte, mais le show d’Oliver Jones était tout simplement parfait. Dans cette escalade de shows vus cette année au FIJM, celui-ci a été au top. La légende fêtait ses 80 ans, mais on ne les sentait pas du tout, ni dans son jeu au piano impeccable, ni dans son attitude, avec son éternel sourire et son humour sincère. Un grand homme, qui a toujours su rester humble et qui a fait venir quelques-uns de ses amis sur scène. Une tornade de virtuosité au Théâtre Maisonneuve le 5 juillet. Wow, juste wow!

Cette année était la première où j’en voyais autant au FIJM. Ce fut des journées longues et chargées mais j’en suis ressorti un peu plus amoureux du jazz qu’avant. Je crois que tout festival doit ultimement contribuer à aimer un peu plus ce qui est mis en valeur lors de l’événement, et je Festival de jazz de Montréal, même s’il a des visées commerciales très évidentes (l’organisation se plaint de la baisse des ventes), continue à offrir des spectacles de qualité avec des grands noms, de jeunes loups qui seront les vedettes de demain, et des shows dans des styles hors des limites du jazz pour attirer un public plus large encore. C’est toujours une belle expérience et pour ça, chapeau au FIJM et c’est un rendez-vous l’an prochain.


En savoir plus sur Critique de salon

Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

Votre commentaire