L’emprunt(e) volume 1 – Prairie Comeau

Sorti le 22 mars 2024

Quand on a entendu pour la première fois le nom du duo Prairie Comeau (Anique Granger et Benoît Archambault (Mes Aïeux), qui proposent un habile jeu de mots avec le nom du chanteur américain Perry Como tout en rappelant les origines de la moitié féminine, elle qui vient de la Saskatchewan), on a bien sûr esquissé un sourire, mais ça aura pris quelques années de plus avant qu’on prenne vraiment le temps d’écouter la musique qu’il a à offrir. On se rattrape enfin avec le EP L’emprunt(e) volume 1, qui permet de découvrir le répertoire entre folk et trad inspiré par le répertoire de la Bonne Chanson.

L’emprunt(e) volume 1 marque d’ailleurs un virage pour Prairie Comeau, qui assume davantage ses couleurs trad, se mêlant au folk americana. La réalisation signée Nicolas Boulerice (membre du célèbre groupe trad Le Vent du Nord) n’est certainement pas une coïncidence non plus. Pour ce qui est du répetoire, la Bonne Chanson est une source quasi inépuisable de matériel qui a traversé les époques, parfois sans vraiment prendre de rides, ce qui sert de «terrain de jeu naturel et inspirant» pour le couple. Cela donne des résultats très intéressants, alors que les textes sont indéniablement tirés d’une autre époque, mais que leur message, lui, demeure étrangement d’actualité.

En ouverture, Tout passe nous offre une chanson relativement minimaliste et feutrée, mettant de l’avant le mariage des deux voix tout en poésie. La seconde moitié de la piste est un peu plus atmosphérique, mais aussi réussie. On a ensuite droit à la berçante Partons la mer, qui laisse principalement la place à Anique Granger et à une bonne dose de nostalgie. C’est ensuite Benoît Archambault qui prend la place dans Le couteau, inspirante fable sur la générosité envers les plus démunis. Le seul bémol qu’on peut lui trouver est la coupure peu après la barre des 3 minutes, donnant l’impression qu’on est passé à la prochaine chanson. On se surprend donc de voir revenir dans les toutes dernières secondes la fin de cette histoire.

Dans Comment veux-tu, on change assez fréquemment d’énergie, et ce, en moins de 3 minutes : le tout début est un folk empreint de mélancolie, puis on a droit à un changement de voix vers 50 secondes, menant ensuite à un changement majeur de tempo un peu avant 1min30. Cela fait beaucoup à digérer en peu de temps! La suivante, Les amants malheureux, est probablement la plus réussie du EP, à la fois grâce à l’instrumentation bien garnie, mais pas surchargée, et l’interprétation vocale, où on sent bien la tendresse entre les deux chanteurs. Le bref opus se conclut avec La chère maison, bouclant la boucle avec un morceau on ne peut plus minimaliste puisqu’il est entièrement a capella; on n’entend qu’un son d’horloge à la toute fin, qui sert à faire un lien avec le début de Tout passe lorsqu’on écoute l’enregistrement en boucle.

Il y a quelque chose de très enveloppant à écouter L’emprunt(e) volume 1, d’une douceur qui fait du bien à entendre. On ne peut pas dire qu’on est particulièrement familier avec le répertoire de la Bonne Chanson, alors on ne peut que spéculer sur les chansons qui ont conservé leur scructure et leurs textes d’origine et ceux qui ont été remis au goût du jour par Prairie Comeau, mais dans tous les cas, on sent ce lien fort mais difficile à expliquer entre le passé et le présent. Et c’est une bien belle sortie qui arrive à point avec le printemps et on a hâte de voir comment le duo va continuer d’articuler sa direction artistique dans le futur.

Il est possible de se procurer cette musique sur la page Bandcamp du duo.

À écouter : Partons la mer, Les amants malheureux

7,9/10

Par Olivier Dénommée