Both Ways – Donovan Woods

Sorti le 20 avril 2018

La série de critiques des albums de l’Ontarien Donovan Woods se poursuit, lui qui a lancé en 2018 son 5e album, intitulé Both Ways. Surfant sur un succès grandissant depuis son précédent album Hard Settle, Ain’t Troubled, Woods ne s’est toutefois pas assis sur ses lauriers et livre 2 ans plus tard Both Ways, poursuivant sur sa lancée d’un folk tantôt simple, tantôt enrobé d’arrangements inspirés.

Si vous lisez régulièrement nos critiques, la voix vulnérable du chanteur n’est plus à présenter depuis un certain temps. C’est sa marque de commerce depuis longtemps et elle est plus assumée que jamais ici. La première de l’album, Good Lover, la met bien en valeur dans un morceau doux et émotif. L’utilisation du banjo comme instrument principal peut surprendre à la première écoute, mais il est loin d’être dérangeant dans ce contexte. Vraiment une bonne entrée en matière!

Après la douceur, on se lance dans un country plus énergique avec Another Way. Bien qu’on la trouve légèrement surchargée alors qu’on a l’habitude d’un folk plus feutré pour laisser la place à la voix, il faut dire qu’elle se défend plutôt bien, autant au niveau des mélodies que de la construction de la chanson. Pour nous, la suivante, Burn That Bridge, améliore presque en tout point la formule d’Another Day : les arrangements respirent un peu plus, bien qu’on assume une énergie plus rock ici, et on propose un build-up particulièrement solide menant à la fin. Si par le passé on s’est montré critique de la tendance de Donovan Woods à répéter ad nauseam certaines lignes dans ses chansons, chaque fois qu’il répète «We gonna burn that bridge», elle gagne en puissance grâce à la progression d’accords, ce qui crée un effet particulièrement réussi.

Si Truck Full of Money n’a pas la même magie au niveau des arrangements, elle se défend aussi très bien, notamment avec l’ajout de cordes qui lui donnent une autre dimension. Après quelques morceaux plus chargés, Our Friend Bobby paraît bien nue, mais elle remplit néanmoins son mandat. Elle a aussi l’avantage de préparer le terrain à une autre chanson dans le registre minimaliste, I Ain’t Ever Loved No One, chanson larmoyante chantée en duo avec Rose Cousins. Voilà un autre rappel que quand on a une bonne chanson, pas besoin de gros arrangements pour atteindre la cible.

Après une piste aussi touchante, l’énergique I Live a Little Lie est presque inappropriée, mais son efficacité parvient à nous faire changer d’idée. Easy Street nous surprend un peu avec ses synthés au début de la chanson, mais on va vite ailleurs, notamment avec un refrain country simple mais franchement efficace. Si une sitcom appelée Easy Street existait, aucun doute que ça serait sa chanson-thème. I Don’t Belong to You est plus difficile d’écoute : la musique est plus saturée, perdant la voix du chanteur et plusieurs éléments mélodiques. Notons que c’est ce qui s’apparente le plus à un faux pas sur cet album!

Elle est suivie de Read About Memory qui, au contraire, y va d’un morceau feutré à souhait. Great Escape accélère un peu le tempo et ajoute quelques instruments en cours de route, mais ne sacrifie pas trop son émotivité… du moins jusqu’à l’explosion dans la deuxième moitié de la piste qui nous prend par surprise! Cela nous mène à la conclusion, Next Year, terminant sur un simple folk guitare-voix qui se bonifie quelque peu au fil de l’écoute. Cela reste une conclusion impeccable à un album auquel on trouve bien peu de défauts.

Par le passé, on a souvent commenté sur la musique de Donovan Woods qu’il livrait souvent des albums inégaux dans la mesure où toutes les chansons n’ont pas la même force. Mis à part le choix questionnable de I Don’t Belong to You, on peut dire que ce défaut est essentiellement inexistant dans Both Ways, alors qu’il joue habilement avec les intensités et les émotions, mais sans proposer de chansons qu’on aurait envie de sauter en écoutant l’album. On n’avait pas lu avant de commencer à écouter l’album qu’il avait remporté un prix Juno en 2019 et on doit dire qu’il ne l’a pas volé!

À écouter : Good Lover, Burn That Bridge, I Ain’t Ever Loved No One

8,2/10

Par Olivier Dénommée